[alerte] - JM Bérard - 10 décembre 2014

Sommaire

À savourer

* Concert dans l’intimité, données massives et culture

*Chantons sous la pluie

Au fil des jours

* Publicité

* Travail le dimanche

*Vos contributions

Évaluation à l’école

Appel à un don

À propos de [alerte]

Le nuage de [alerte]

Fonctionnement de la lettre [alerte]

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Ce texte est écrit dans l’orthographe recommandée 1990. Si vous n’êtes pas familier avec cette orthographe, certaines façons d’écrire vous apparaitront comme des fautes. Actuellement, les deux orthographes (usuelle et recommandée 1990) sont acceptées.

http ://www.orthographe-recommandee.info/

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À savourer

* Concert dans l’intimité, données massives et culture

J’ai organisé un soir, dans la plus stricte intimité, une écoute de chansons françaises à partir de Youtube. C’était émouvant, toute notre enfance et notre jeunesse. Mais j’en parle surtout pour la politique de sélection de Youtube. Dans les deux précédents numéros de [alerte] je m’inquiétais des conséquences des propositions culturelles que font les grands réseaux, Amazon et Google en particulier. On nous propose ce qui est censé nous avoir déjà intéressés, et l’on tourne en vase clos dans sa propre conception du monde, loin d’une culture qui ouvre. Youtube procède différemment : après l’écoute d’une chanson, on vous propose de nouveaux choix, mais qui ne se limitent pas à ce que vous avez déjà choisi : de subtils glissements en propositions pertinentes j’ai commencé le concert par une chanson et un auteur que je connaissais bien et terminé par une chanteuse dont je n’avais jamais entendu parler et par des propositions de musique de jazz auxquelles je n’aurais pas pensé. Je ne suis pas dupe : les choix qui me sont proposés résultent de l’analyse, grâce à la technique des données massives, de choix faits par la majorité des utilisateurs : ceux qui aiment tel chanteur aiment aussi... ce qui est une conception de la culture très contestable. Avec cette méthode on ne me proposerait jamais de lire Modiano, et, tout comme la majorité des Français et comme la ministre de la culture, je continuerai de l’ignorer. Mais tout de même, avec Youtube, on n’est pas totalement enfermé dans son propre monde.

Une belle chanson : https ://www.youtube.com/watch?v=PLk31tFwUpA

*Chantons sous la pluie

Reçu de l’un de vous, merci.

Je connais et je partage ton enthousiasme pour

Ces chansons qui font l’histoire

http ://eduscol.education.fr/chansonsquifontlhistoire/

Commentaire JM B : on trouve sur ce site tout un ensemble de chansons, classées selon différents critères et qui, outre la version chantée complète sont accompagnées de commentaires historiques brefs mais passionnants. N’hésitez, pas, flânez à partir de la page d’accueil. Un exemple

http ://eduscol.education.fr/chansonsquifontlhistoire/Y-a-d-la-joie#nav

Cliquer sur Play.

Suite du message de l’un de vous : Bertrand Dicale a récidivé – centenaire oblige, avec La fleur au fusil sur France Bleue,

http ://nvx.francebleu.fr/chansons-guerre-14-18/

Ce site offre quatre superbes clips et reprend toutes les chroniques plus un livre

http ://editions.radiofrance.fr/produits/la-fleur-au-fusil-14-18-en-chansons/

Commentaire JM B : le site carnets de chants offre quatre beaux clips (musique, images).

Un exemple : « tourneuses d’obus »,

http ://nvx.francebleu.fr/chansons-guerre-14-18/tourneuses-d-obus/

Le même site propose des commentaires sur ces quatre clips et l’accès à une cinquantaine de chansons de la guerre de 14-18 classées en quatre thèmes avec commentaire historique.

Bon, dit comme cela cela parait un peu sec. Cliquez, vous entendrez, c’est un régal.

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Au fil des jours

* Publicité

Une campagne publicitaire, que ce soit dans le métro parisien ou dans la presse nationale coûte très cher : études d’opinion, mobilisation de graphistes, de designers, de concepteurs… Je suis donc toujours stupéfait de constater dans certaines campagnes de pub de grosses erreurs de conception, de grosses fautes d’orthographe. Payer tant de gens si cher pour aboutir à ça ! Ainsi en va-t-il de la campagne pour la voiture Audi A3 e-tron. La technologie e-tron est la combinaison parfaite entre la puissance d’un moteur thermique et l’efficience d’un moteur électrique. C’est bon ça, coco. Les concepteurs n’ont tout simplement pas remarqué qu’en français le mot étron désigne un excrément moulé de l’homme ou de certains animaux, synonyme de crotte. Hypothèse : tous ces concepteurs de haut niveau ne connaissent pas le mot étron. Ou alors ils ont supposé que peu de gens connaissent ce mot et que son emploi ne nuirait pas... Audi A3, la voiture crotte. Bon, si j'étais simpliste je dirais « quel superbe aveu du système libéral », mais franchement c'est trop facile. Seigneur pardonnez leur, ils ne savent pas ce qu'ils disent.

* Travail le dimanche

Pour notre gouvernement de droite le travail du dimanche est devenu un symbole : il faut libérer l’économie de toutes les contraintes qui empêchent les gens de travailler, pour apporter à chacun le bonheur de travailler et offrir un rendement suffisant aux capitaux investis. Drôle de société où travailler est devenu un bonheur, alors que (sauf dans de rares cas) ce n’est pas un but en soi mais une condition nécessaire pour vivre, pour avoir une vie familiale, sociale, culturelle. Ainsi en va-t-il du travail du dimanche. S’il n’y a pas dans la société un jour de repos commun, quand va-t-on aller au match de foot, inviter ses amis, recevoir ses enfants dans les familles séparées, faire une randonnée avec son club ? Même si l’on offre des compensations, cela ne règlera pas le problème d’un jour commun où l’on peut se retrouver. Il y a déjà 30 % de personnes qui travaillent le dimanche (hôpitaux transports…) c’est bien assez. Quant à la relance de l’économie !!! Les consommateurs vont-ils vraiment acheter encore le reste de la semaine ce qu’ils ont déjà acheté le dimanche ? Et vont-ils acheter une deuxième fois en semaine dans les boutiques de proximité ce qu’ils auront déjà acheté le dimanche au supermarché ? Ce n’est pas grave : les petits commerçants fermeront boutique et seront embauchés par les grandes surfaces.

Madame Parisot, ancienne présidente du patronat français, me rassure : faire les courses en famille au supermarché fait la joie de la cellule familiale. On m’avait pourtant dit que cela peut aussi être intéressant d’admirer la forêt ou d’aller au cinéma ou au musée, parents et enfants prenant le temps de se voir et de flâner. Quelle drôle de société : on nous propose de travailler et de consommer.

*Vos contributions :

Je n’oublie pas vos contributions sur la pollution par les particules fines (gros travail de l’un de vous), sur les redoublements, sur l’individualisme, je n’oublie pas le quatre-pages de Libé sur le transhumanisme. Mais je ne pense pas pouvoir doubler le nombre de pages de [alerte] ou transformer [alerte] en quotidien. Toutes ces réflexions sont reportées au prochain numéro. Merci pour vos contributions.

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Évaluation à l’école

Libération le 9 décembre 2014 titre en une « École, zéro pour les notes », et consacre six pleines pages sérieusement faites à la réforme de l’évaluation des élèves initiée par le gouvernement.

J’ai au cours0 de mon cursus professionnel beaucoup travaillé sur ces questions, je me dis régulièrement « il faut que j’écrive quelque chose pour [alerte] », et puis l’ampleur du sujet (il y aurait tant à dire, à expliciter) et la façon totalement « à côté de la plaque » dont certains parents, certains enseignants, certains syndicats, certains hommes politiques, certains journaux mènent le débat décourage : comment faire face à un tel océan d’incompréhension ?

Aggravant mon découragement, la très sérieuse Association Françaises des Acteurs de l’Éducation a tenu colloque sur la question « Doit-on, peut-on réformer l’éducation ; ». Conclusions peu enthousiasmantes : oui il faut, mais c’est très difficile, quasi-impossible au niveau central.

Il est difficile de démêler l’écheveau des débats sur la notation et l’évaluation, tant en France la pratique de l’évaluation recouvre des objectifs très divers.

Déjà lorsque la note a été introduite dans l’enseignement public, (seulement en 1890) elle avait un fort rôle de classement et de sélection. La situation s’est peut-être aggravée, dans une société où la compétition, la sanction et l’élimination règnent en maitres. Le sociologue Antibi décrit sous le nom de « constante macabre » les effets de cette situation : aux yeux de tous, un professeur qui donne de « trop » bonnes notes est considéré comme laxiste, ce n’est pas un bon professeur. Souvent, dans l’évaluation telle qu’elle est majoritairement pratiquée, il ne s’agit pas de déterminer comment faire progresser tous les élèves, mais comment les trier, les orienter.

Ajoutons à cet objectif implicite de sélection, de tri et d’élimination une pratique souvent encore trop présente, celle de l’humiliation : tu es nul, tu ne réussiras pas.

Dans ce contexte, le gouvernement a fort mal présenté ses intentions de réforme sur un sujet aussi sensible. Il ne s’agit pas du tout de remplacer des chiffres par des lettres ou des couleurs, le choix du système a au fond peu d’importance. Il s’agit de se demander vraiment : qu’est-ce que j’attends de l’élève, comment puis-je évaluer ce qu’il maitrise, comment le faire progresser sur ce qu’il ne maitrise pas.

Faisant à nouveau une erreur de communication, le gouvernement a présenté la réforme en disant « il faut pratiquer une évaluation bienveillante. » Les syndicats réactionnaires, les parents, les profs, l’UMP renaissante, le Front National ont aussitôt traduit « c’est du laxisme, on nous demande de dire que tous les élèves sont bons » alors que l’enjeu est « comment évaluer sans que les élèves aient la sensation que l’on cherche à les éliminer plutôt qu’à les faire progresser? »

En fait l’évaluation en général pratiquée ne sert que fort peu à déterminer finement les compétences des élèves pour travailler avec précision sur ce qui n’a pas été maitrisé, mais vise surtout à classer.

Si l’on admet ces prémices, le problème reste : que doit-on évaluer, et comment ? La stricte évaluation de connaissances ne suffit pas à faire progresser l’élève.

Un exemple : un élève a une mauvaise note en « rédaction » à l’école. Il a une mauvaise note et souvent une appréciation lapidaire en rouge en haut de la copie. (Sujet mal compris, mal dit, peut mieux faire…) En quoi cette mauvaise note va-t-elle l’aider à progresser ? Maîtrise-t-il mal l’orthographe ? La syntaxe ? La façon d’enchainer logiquement un récit ? Son manque de vocabulaire nuit-il à la richesse du récit ? Son manque de culture général l’empêche-t-il « d’avoir des idées » intéressantes ? La note globale ne résoudra aucun de ces problèmes. Il faudrait analyser les raisons de la mauvaise note et proposer des stratégies ou des remédiations qui permettront d’agir vraiment et de faire progresser. Un manque de « culture générale », la pauvreté du vocabulaire ne relèvent pas des mêmes remédiations qu’un manque d’orthographe.

Un autre exemple : qu’évalue-t-on en notant les travaux pratiques de physique au bac ? Le fait de savoir utiliser un voltmètre, le fait de concevoir une démarche expérimentale pour répondre à une question, le fait de savoir de façon pertinente utiliser une loi physique pour traiter et interpréter les mesures… En fait on évalue tout cela. Même si au final on doit, pour l’examen, mettre une note, il faut élaborer des systèmes d’évaluation de ces diverses compétences, une vue globale ne suffit pas.

Pour faire court : une appréciation globale ne peut pas aider l’élève à progresser, il faut une analyse fine des points qui lui font défaut. C’est évidemment un énorme travail, construire des outils d’évaluation, construire des outils de remédiation. Il est beaucoup plus pertinent de construire ces outils en équipe d’enseignants. Mais à ce travail en équipe les enseignants français ne sont nullement préparés.

J’ai durant tout mon cursus estimé qu’il était indispensable de modifier les méthodes d’évaluation. Face à l’opposition d’une partie des syndicats, d’une partie des professeurs, d’une partie des parents, la ministre aura je le crains bien du mal à avancer. Surtout si l’on s’enlise dans de faux débats (faut-il des notes ou des lettres) ou des expressions maladroites qui créent des erreurs d’interprétation sur l’objectif visé (notation bienveillante).

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Appel à un don

Je vous parle souvent de la ligue contre la violence routière, qui agit avec détermination pour diminuer le nombre de morts par accidents de la route. Comme beaucoup de journaux ou d’associations la ligue est en grandes difficultés financières et fait appel aux dons. Ces difficultés résultent en particulier de la baisse des subventions de l’État.

Début de lettre de la ligue :

Depuis 40 ans le recul de la mortalité sur nos routes a été extraordinaire : le nombre de morts a été divisé par 4 et le risque routier au kilomètre parcouru divisé par 18. Aujourd’hui, ceci pourrait laisser croire que l’objectif est atteint et qu’il ne faut plus produire d’efforts. Le monde politique n’y voit plus une priorité : pour preuve aucune mesure significative n’a été prise depuis mars 2013 (mise en place des radars mobiles-mobiles 3ème génération).

La prévention a ceci de paradoxal : plus elle est efficace, moins on l’estime utile, car le danger s’éloigne et semble moins inquiétant.

Pourtant, 2014 sera malheureusement une mauvaise année pour la sécurité routière. Nous estimons qu’il y aura une remontée importante du nombre de morts sur nos routes, la première hausse depuis 12 ans !

L’objectif national de limiter à moins de 2000 le nombre de tués en 2020 parait maintenant inaccessible. L’État est de plus en plus soumis aux puissants lobbys défenseurs d’un comportement routier qui place la liberté individuelle au dessus-de-tout.

Adressez vos dons (10, 20, 30 euros ou plus) à la ligue contre la violence routière 15 rue Jobbé Duval 75015 Paris. 66 % du don sont déductibles des impôts. Pour recevoir le reçu fiscal bien préciser vos nom, prénom et adresse.

http ://violenceroutiere.org

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Fin de la lettre du 2014 12 10/10 décembre 20142014

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À propos de [alerte]

Diffusion libre à condition de citer la source, [alerte] JM Bérard, et impérativement la date.

Le nuage de [alerte]

J’ai placé dans le nuage de [alerte] des textes et documents divers, avec le seul critère qu’ils me semblent intéressants et méritent d’être portés à votre connaissance. Cliquez, naviguez. Pour accéder au nuage cliquer sur :

https://drive.google.com/?authuser=0#folders/0B_Wky0_FwW1tekd3aXNsOEpwVk0

Fonctionnement de la lettre [alerte]

Inscription sur la liste de diff sur simple demande. On peut aussi se désinscrire. Les adresses des destinataires n’apparaissent pas lors de l’envoi.

jean-michel.berard x orange.fr

Ce qui est écrit dans cette lettre n’engage strictement que moi, sauf bien sûr s’il s’agit de la citation d’un appel ou d’un communiqué.

Les remarques et réactions que vous m’envoyez concernant ce que j’écris me sont précieuses, indispensables, car elles font rebondir la réflexion.

J’explique dans chaque numéro pourquoi, lorsque je publie l’une de vos réactions, je ne mentionne pas votre nom. La liste de diffusion comporte 200 abonnés, qui plus est la lettre est disponible sur internet, et je pense que vous ne tenez pas forcément à ce que votre qualité de lecteur de [alerte] soit diffusée ainsi.

Les messages que vous m’envoyez, s’ils concernent la lettre [alerte], peuvent être diffusés dans la lettre, (un peu comme le courrier des lecteurs qui écrivent à un journal), mais sans que votre nom soit cité. Si en m’envoyant une réaction sur la lettre vous ne souhaitez pas du tout qu’elle soit publiée, merci de me le signaler.

Vous pouvez demander à recevoir la lettre par liste de diffusion (noms des destinataires masqués). jean-michel.berard   orange.fr