[alerte] - JM Bérard - 27 novembre 2019

 

 

 

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Les lettres [alerte] sont disponibles sur

http://alerte.entre-soi.info

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Ce texte a été revu par le logiciel Antidote (orthographe, grammaire, langue). J’ai choisi l’option « orthographe rénovée 1990. » Ce logiciel m’a été recommandé par la linguiste Danièle Cogis.

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La ville où l’on est né

Emmanuel Macron a passé récemment deux jours à Amiens, la ville où il est né, et je me demandais à ce propos « Être né quelque part, qu’est-ce, pour chacun de nous ? »

https://www.youtube.com/watch?v=H-WpvJx6nfQ

Au sens de la chanson, je ne suis pas sûr d’être né quelque part.

MM m’envoie le texte suivant, merci.

Le 10 mai 1944, l'usine SRO* était bombardée et entièrement détruite par les alliés. [JM B : J’avais 15 mois.] Ce que mes parents m'ont rapporté : nous étions dans les abris souterrains sous le château (entrée 50 m du logement Rue Perrière), tandis que l'Avenue Berthollet étant beaucoup trop loin de l’abri, vous étiez réfugiés dans votre cave ( à moins de 500 m de l'usine !).

SRO fournissant de roulements à billes pour les chars allemands était considérée comme stratégique. Nationalisée en 1944 (sous le nom de Société Nationale des  Roulements -SNR) , elle est maintenant détenue par les Japonais ( NTN-SNR) . Plus de 4000 ouvriers à l'époque, quelques 3000 actuellement autour d'Annecy et  dans  le midi.

Me promenant dans les rues d'Annecy encore ce dimanche, je me sens maintenant comme étranger.  Avec environ 12 000 habitants de plus par an la Haute-Savoie -seulement  200 000 en 1944- frôle bientôt le million. Industries, tourisme et surtout proximité de Genève ( 80 000 frontaliers !).

https://www.ina.fr/contenus-editoriaux/articles-editoriaux/anna-marly-celle-qui-crea-le-chant-des-partisans

Pour écouter, cliquer sur la deuxième image, ou encore sur

https://www.ina.fr/video/CAC00034282

JM B : Les paroles du chant des partisans sont de Druon et Kessel, la musique de Anna Marly, décédée en 2006. Je ne chercherai pas du tout à savoir pourquoi, mais lorsque j’étais petit, enregistré sur un 78 tours, le chant des partisans était un peu l’obsession de mon père, cette musique passait en boucle lancinante à la maison.

JM B : Ce que l’on m’a dit plus tard (mon père ? Je ne sais pas. Il parlait très peu.) est que l’armée US était soucieuse de ne pas exposer trop de boys à être tués. Ils bombardaient donc l’usine de très haut, en ne donnant pas la priorité à la vie des gens au sol. La maison de mes parents, très proche, n’a cependant pas été touchée. (Si je croyais en Dieu, je dirais que cela a été le premier des nombreux miracles qui m’ont permis d’échapper à de multiples dangers. )

Mais bon quelle importance, je ne crois pas en Dieu, et je suis vivant. Je ne vous donne pas de lien vers une chanson, car les réponses attribuent souvent ces paroles aux disciples de Jésus après sa sortie du tombeau « Il est vivant ». À aucun moment dans les Évangiles Jésus Christ ne chante, ou ne sourit, ou ne plaisante. Je lui connais un seul jeu de mots, « tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon église. » Je viens de consulter le moteur de recherche. Je me trompe, ce n’est pas du tout un jeu de mots. Dans la langue de Jésus et de ses disciples, l’araméen, Pierre n’est pas un prénom. C’est Jésus qui le nomme ainsi pour dire que c’est le Pierre fondement de l’église. Je ne veux choquer personne, mais beaucoup d’analyses historiques estiment que Marie Madeleine était l’épouse légale de Jésus Christ. L’argument historique essentiel est que, à l’époque dans cette région un homme adulte n’était pas célibataire. On a raison de respecter les femmes. Il semble que dans la vie quotidienne Jésus n’était pas très amusant.

Cela m’évoque un peu, de très loin, les problèmes éthiques posés par la conception des logiciels de pilotage des véhicules autonomes : si l’on est dans une situation telle que les choses sont inévitables, doit-on programmer le véhicule autonome pour qu’il écrase le piéton qui passe devant la voiture ou jeter la voiture contre un mur et tuer le conducteur. ? Je ne sais pas comment le débat a été tranché : le conducteur aura-t-il le choix en option en achetant la voiture ? J’espère que non. Ce qui fait frémir est que l’on aurait à décider. En général c’est le « hasard » de la lenteur de nos réflexes qui décide et la décision n’est pas préconçue. Je crois que pour l’instant les développeurs de logiciels ont décidé de ne pas prendre en compte les qualités de la personne à tuer ou à épargner : âge, couleur de peau, niveau de formation Ce ne serait pourtant pas impensable, vaut-il mieux épargner un enfant qui traverse ou la personne âgée qui est au volant ? Dans le premier cas, on se dit que l’on préserve l’avenir, mais dans le deuxième on préserve tout un capital social acquis (formation, compétences.) Dans 1984 de Orwell, on pourrait tout à fait décider que chacun portera un badge, et que l’on pourra décider en fonction de sa couleur, de son niveau de formation (investissement de la société). D’ailleurs je ne suis pas à jour de mes propres préoccupations : avec la reconnaissance faciale plus besoin de badge. Orwell n’avait pas pensé à la reconnaissance faciale. Attention : ce que je viens d’écrire est parfaitement possible, cela ne dépend que des valeurs éthiques du pouvoir en place. Au moins une ville en France possède déjà une base de données des visages de tous les habitants. Cela suscite de vives craintes de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Pour l’instant en France, je crois qu’il n’y a pas encore, légalement, sauf de rares exceptions pour des transports en commun, de véhicules entièrement autonomes.

Dans Le meilleur des mondes Huxley décrit une société où les êtres humains sont préconçus in vitro, en dehors du système homme/femme, pour appartenir à cinq classes, en fonction de capacités intellectuelles décroissantes de alpha à epsilon et de capacités physiques d’esclaves croissantes de epsilon à alpha. Les recherches actuelles sur la biogénétique rendent ces perspectives tout à fait vraisemblables et entrainent, dans de nombreux pays, la mise en œuvre de lois de bioéthique. Avec une crainte pas du tout imaginaire : que devient l’humanité lorsque les manipulations génétiques deviennent à la portée de n’importe quel illuminé ou de n’importe quel système politique ou social ? La question, qui concerne en fait tout être humain, a commencé à se poser publiquement dans le réel à propos d’un « savant » capable de procéder très simplement à des manipulations génétiques. J’en avais parlé ici. Je crois que c’était il y a un an. Si l’on regarde un peu, on peut craindre que, dès maintenant, dans le monde, les dictatures de plusieurs pays puissent être tentées.

Ce que je dis a l’air monstrueux et invraisemblable, et pourtant. Si vous êtes le chef des armées des USA (nos amis dans cette guerre), vous êtes bien obligé de donner aux pilotes des consignes sur la hauteur du bombardement et donc de leur dire combien d’habitants d’Annecy on peut tuer. Ne soyez pas surpris. Cela existe couramment en 2019 : pour toute action, les commandements doivent déterminer combien de personnes n’ayant rien à voir on peut tuer pour une personne utile tuée. Je vous assure. Lorsqu’on bombarde un village pour tuer un chef djihadiste, combien de villageois peut-on tuer en plus du chef. Je vous assure, tous les états-majors ont ces questionnements, cela avait été montré de façon très claire lors d’une conférence de l’association Sciences citoyennes. (Je crois que la réponse est 15, ou quelque chose de cet ordre de grandeur. Si dans un village vous pensez qu’une personne est un chef visé par l’armée US, tenez-vous à plus de quinze personnes. Ce raisonnement est-il condamnable moralement ? Et si l’on commence comme cela, à partir de quel seuil d’efficacité espérée peut-on se dire que la torture est justifiée ? Pour la torture, ma réponse personnelle est 0, mais toutes les futures victimes le contesteront. Pour les bombardements des villages, je pense que l’on n’a pas le droit de ne pas se poser la question.

Bon, les « lois » de la guerre ne sont pas tout à fait en adéquation avec l’éthique et la morale usuelles. C’est la guerre. Premier commandement : tu ne tueras point. Vous voyez bien, Ève n’a pas été victime d’un féminicide. Il le fallait bien, sinon les choses auraient tourné court. Pas de féminicide, pas d’homicide. Mais cela n’a pas duré, Caïn a tué Abel. Je vous raconterai un jour pourquoi, schématiquement cela revient à rechercher comment je peux faire en sorte que mon père m’apprécie plus que mon frère. Et du coup, au lieu de décider de se passer de l’opinion du père et d’aimer son frère comme soi-même, on tue son frère. Sans même être certain que le père approuvera.

Tout cela pour dire que même dans des mythes sacrés, l’homme, pourtant créateur de ces mythes, a toujours considéré que certes tu ne tueras point, mais que tout de même L’homme crée et s’impose les dix commandements. Pour que cela soit admis par l’opinion publique il en attribue la paternité à Dieu. Ce sont en fait des lois d’ordre public sans lesquels la société s’effondrerait. Ce qui m’a toujours étonné, aussi bien dans la Genèse que dans les dix commandements, est l’absence totale de perspectives quant au respect de notre cadre de vie. Même pas « tu ne rendras pas imbuvable l’eau du puits de ton voisin » ou « tu ne provoqueras pas la mort de ton voisin et de ses animaux par les fumées de ton foyer. » ou « tu ne priveras pas tes voisins de leur part d’eau du Nil. » Cela m’étonne vraiment, car même à l’époque il me semble que c’était tout à fait vital. Pourquoi le respect du cadre de vie est-il durant des siècles si absent des préoccupations humaines ? Peut-être parce que le moment où la destruction anthropique du cadre de vie est devenue préoccupante est récent dans l’histoire humaine. À l’époque il y avait de la place et des ressources avant d’atteindre des limites. C’est le développement de l’industrie qui l’a rendue préoccupante. Fin insert JM B

Suite MM * SRO fournissant de roulements à billes pour les chars allemands était considérée comme stratégique. Nationalisée en 1944 (sous le nom de Société Nationale des  Roulements -SNR) , elle est maintenant détenue par les Japonais ( NTN-SNR) . Plus de 4000 ouvriers à l'époque, quelques 3000 actuellement autour d'Annecy et  dans  le midi.

Clin d’oeil pour l’un de vous : je connaissais l’un de ces ouvriers. L’usine travaillait pour les nazis, elle n’avait pas le choix, mais l’ouvrier que je connaissais et son épouse agissaient aussi, au risque de leur vie, pour la résistance.

Fin du texte MM : me promenant dans les rues d'Annecy encore ce dimanche, je me sens maintenant comme étranger.  Avec environ 12 000 habitants de plus par an la Haute-Savoie -seulement  200 000 en 1944- frôle bientôt le million. Industries, tourisme et surtout proximité de Genève ( 80 000 frontaliers !).

Tu ne convoiteras pas les biens de ton prochain

Là encore, ce commandement semble d’évidence pour préserver la société. Mais c’est un commandement qui ne vaut que dans les sociétés où l’on a des biens à soi. Constatons de plus que ce n’est pas un commandement efficace, car fréquemment on fait la guerre (rite socialement admis) justement pour prendre les biens du prochain.

Ce qui est frappant c’est que en général ce commandement a pour corolaire « tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain », ce qui ramène la femme au rang de bien comme un autre. Notons que cette notion de couple un homme une femme n’apparait que dans les sociétés où la notion de filiation est essentielle. La filiation par la mère est facile à constater, mais la paternité, qui fonde le droit de l’homme, ne vaut que si chaque femme a un seul homme. Et du coup cet homme peut avoir plusieurs femmes, on saura qui sont ses fils. Les sociétés traditionnelles sont fondées sur la paternité, et, je serais tenté de dire « donc », sur la propriété et le fait que chaque femme n’a qu’un seul homme. Vraie question : est-ce que dans l’avenir les tests génétiques permettant de déterminer la paternité vont rendre obsolète la loi « morale » selon laquelle une femme ne peut avoir de relations sexuelles que avec un seul homme ? Je sais, j’ai l’air de dire que les lois morales ne sont pas transcendantes, mais qu’elles ont pour fonction de préserver l’ordre social. En fait, c’est bien ce que je dis.

L’ultime alerte des scientifiques : la biodiversité en péril

C’est le titre de couverture du numéro spécial de la revue La Recherche daté de décembre 2019. La dernière en date oui. Ultime ? Pourquoi ce terme ? Je pense que, bien que la situation soit critique à court terme (avant la fin du siècle, probablement, pour ce qui concerne la biodiversité) j’ai la naïveté de penser que l’humanité a encore un tout petit peu de temps disponible dans ce cadre de vie. En tout cas la lecture de la revue est très secouante. Extrait de l’éditorial : «  Dans leur rapport sur la biodiversité rendu en mai 2019 les experts de l’ONU constatent qu’un million d’espèces sont menacées d’extinction. […] Si nous voulons continuer à habiter cette planète, il faut prendre garde à ne pas romptre un équilibre précaire. […] Quels arguments opposer à ceux qui considèrent que la biodiversité ne les concerne pas ? L’argument éthique : en quarante ans on a tué la moitié des éléphants et des girafes. L’argument financier en pollinisant les fleurs, les abeilles rendent un service que l’on estime à 200 milliards d’euros par an (par comparaison avec ce que couterait la nécessité de polliniser à la main, pour sauver les plantes, ce qui se fait déjà dans certaines zones en Chine.) Alors, oui, on peut se féliciter quand les politiques annoncent des mesures de protection. Un peu moins quand elles sont prises sans suivi. Dans le golfe de Gascogne, 1200 cétacés se sont échoués l’hiver dernier, un arrêté préfectoral (le préfet est un fonctionnaire entièrement soumis à l’autorité de l’État) propose d’autoriser la pratique du chalutage par filet tiré entre deux bateaux dans une zone où elle est actuellement interdite.Conclusion de l’éditorial : il y a de quoi s’interroger sur la volonté réelle d’agir pour les générations futures.

Gilles Boeuf, spécialiste de biologie marine, estime que « s’il manque un maillon, toute une chaine du vivant peut s’arrêter. Un million d’espèces animales et végétales sur une estimation de près de neuf-millions d’espèces vivantes. Depuis 600 millions d’années, on estime qu’il y a déjà eu 60 crises d’extinction. La différence est que la crise actuelle, par rapport aux précédentes, est très rapide et que toutes les études concourent à montrer le rôle fortement déterminant de l’activité humaine dans cette accélération.»

CGU de la lettre [alerte], mise à jour du 4 janvier 2019

Merci des critiques de ceux de vous qui seraient en désaccord avec tel ou tel point de ces CGU, je modifierai.

CGU signifie « Conditions générales d’utilisation. » Ce sont celles que vous n’avez pas l’habitude de lire lorsqu’on vous demande d’attester que vous les avez lues. Moi non plus d’ailleurs, mais j’ai tort, car les conséquences sont parfois désagréables. Les commerçants le savent bien. Ils savent que dans l’ensemble on va signer sans lire et qu’il faudra attendre les réactions d’internautes plus vigilants ou d’associations pour nous faire prendre conscience.

Ces CGU du 4 janvier 2019 sont valables à partir du 4 janvier 2019 et jusqu’à nouvelle mise à jour.

Directeur de publication JM Bérard, diffusion JM Bérard Chris Boissin.

Inscription sur la liste de diffusion sur simple demande. On peut aussi se désinscrire, sans même avoir à remplir un long questionnaire pour donner les raisons du départ. Les adresses des destinataires n’apparaissent pas lors de l’envoi.

Tous les textes écrits par JM B dans la lettre sont libres de diffusion, à condition de préciser la source (Lettre alerte JM Bérard) et la date. La lettre elle-même est libre de diffusion, les droits pour les textes cités sont réputés avoir été respectés par JM B.

En application du RGPD (règlement général sur la protection des données personnelles, règlement européen renforcé par la France) ne sont inscrits sur la liste de diffusion de la lettre que ceux qui ont exprimé par un acte explicite l’accord pour être inscrits. Ce règlement a une portée très générale. On ne devrait pas en principe recevoir de messages commerciaux ou de messages associatifs ou militants sans avoir donné un accord explicite. Les mentions du genre « si vous ne dites pas non, vous continuerez de recevoir nos envois » ne sont pas légales : il faut un accord explicite. Lorsque le RGPD est entré en vigueur, j’ai demandé à chacune des personnes qui reçoit la lettre par courrier électronique de me confirmer qu’elles souhaitaient la recevoir. J’ai été surpris et déçu, car guère plus de la moitié des personnes concernées ont donné leur accord. J’ai malgré cela décidé de continuer d’envoyer la lettre à tous, mais je n’aurais pas dû.

Le fait de recevoir la lettre ne signifie pas qu’on soit en accord avec son contenu. En dehors des gestionnaires JM Bérard et C. Boissin, nul ne connait les adresses des destinataires, qui ne sont communiquées ou vendues à quiconque.

Vous pouvez m’écrire à

jean-michel.berard xx orange.fr

Ce qui est écrit dans cette lettre n’engage strictement que moi, sauf bien sûr s’il s’agit d’une citation.

Les remarques et réactions que vous m’envoyez concernant ce que j’écris sont précieuses, indispensables, car elles contribuent à la réflexion de tous.

Lorsque je publie l’une de vos réactions, je ne mentionne pas votre nom. La liste de diffusion comporte près de 300 abonnés, qui plus est la lettre est disponible sur internet et je pense que vous ne tenez pas forcément à ce que votre qualité de lecteur de [alerte] soit diffusée ainsi à tous les vents. Je peux selon ce que vous souhaitez citer votre prénom ou vos initiales, ou continuer à garder la mention « reçu de l’un de vous ».

Les messages que vous m’envoyez, s’ils concernent la lettre [alerte], sont réputés pouvoir être diffusés dans la lettre, un peu comme le courrier des lecteurs qui écrivent à un journal, mais sans que votre nom soit cité. Si en m’envoyant une réaction à propos de la lettre vous ne souhaitez pas du tout qu’elle soit publiée, il faut me le signaler.

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Fin de la lettre du 27  novembre 2019