[alerte] - JM Bérard - 27 septembre 2014

Sommaire

À savourer

Hippocrate

La forêt linéaire

Ce que parler veut dire : Jean Tardieu

Le Robert Correcteur

La vie de nos ministres : Mme Vallaud-Belkacem, le genre humain est en péril

Évolutions de la langue française

Le monde a faim

Pourquoi les Français adhèrent au "salauds de pauvres"

Le nuage de [alerte]

Fonctionnement de la lettre [alerte]


Ce texte est écrit dans l’orthographe recommandée 1990. Si vous n’êtes pas familier avec cette orthographe, certaines façons d’écrire vous apparaitront comme des fautes. Actuellement, les deux orthographes (usuelle et recommandée 1990) sont acceptées.

http ://www.orthographe-recommandee.info/

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À savourer

Hippocrate

Film de Thomas Lilti.

Critique de Télérama : une comédie acide sur les désillusions d’un jeune interne dans un hôpital en crise. Précis, romanesque et solidement interprété.

Dans toute la presse la critique est bonne. J’ai bien aimé.

Bon, je fréquente beaucoup l’hôpital en tant que patient, et, malgré toutes les critiques que j’ai à faire, j’ai plutôt l’impression que la réalité est moins dure que dans le film. Mais tout de même, c’est un bon film.

La forêt linéaire

C’est à Paris, à l’arrêt "Canal St Denis" du tram T3, dans la rue juste derrière, celle qui longe le périphérique. La ville de Paris a conçu une forêt (promenade de 300 m) pour protéger le quartier Claude Bernard de la pollution et du bruit du périph. Pour l’instant on n’en est qu’au début, la forêt grandira en 15 ans, en même temps que les habitants du quartier. Ce qui est passionnant est toute cette réflexion sur la conception d’un espace naturel, la prise en compte de la biodiversité. On est admiratif devant la réflexion des concepteurs. On se croit familier des jardins à la française de Versailles. Là, c’est tout autre chose, non plus un hymne au roi mais une pensée alliée de la nature.

Ce que parler veut dire : Jean Tardieu

Les journées du patrimoine, aux Lilas, étaient consacrées à la famille Tardieu. Le peintre Victor Tardieu a peint le plafond du théâtre des Lilas, son épouse était harpiste, et le fils Jean Tardieu était écrivain. Il a beaucoup pensé et écrit sur le langage. On nous a présenté un spectacle rassemblant les thèmes de plusieurs de ses œuvres : A deviner, Les mots inutiles, Dialogue entre l’auteur et le visiteur, Un mot pour un autre. Fascinant de constater comment dans un dialogue où chaque mot est remplacé par un mot qui n’a aucun rapport, les mimiques, le ton, les conjonctions de coordination, les idées préconçues sur ce qui va se dire font que in fine on comprend fort bien. Je suppose que chacun des ouvrages cités est passionnant. Je ne les ai pas lus. Vous avez sans doute ces ouvrages à la bibliothèque de votre ville ou de votre village, ou à la libraire, Gallimard éditeur.

Le Robert Correcteur

Je tente d’écrire cette lettre avec l’aide du logiciel « Robert Correcteur », en utilisant l’orthographe recommandée 1990. (On peut aussi paramétrer le logiciel avec l’orthographe usuelle.) Pour l’instant je découvre. Cela se présente comme une merveille : dictionnaire, recensement des expressions, dictionnaires des synonymes et des contraires, conjugaison des verbes, correcteur orthographique qui analyse le sens de la phrase et peut ainsi distinguer cession de session. Lorsqu’il détecte quelque chose qui ne lui convient pas, le logiciel vous explique pourquoi. Un étonnement : pour un logiciel cher et qui vient de paraitre, la méthode d’installation est un peu moyenâgeuse. Un autre étonnement : certaines fonctions sont inactives sur des logiciels aussi courants que Open Office ou Windows Live Mail. Cela viendra sans doute.

On peut télécharger une version d’essai gratuite pour 30 jours.

Trouvé au hasard dans le dictionnaire des proverbes : les riches ont la santé, les pauvres les remèdes. C’est ben vrai !Le système scolaire français est très inégalitaire, les dépenses de santé très clivantes.

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La vie de nos ministres : Mme Vallaud-Belkacem, le genre humain est en péril

Une jeune et talentueuse harpiste donne un concert. Qui tourne les pages ? Un jeune homme. Cela va trop loin : à quelles tâches subalternes en sont réduits les hommes ! Mme Vallaud-Belkacem, faut arrêter avec les ABCD de l’égalité, et ne pas aller trop loin. Au moins, au XXe siècle, le harpiste le plus connu mondialement était un homme. Tout fout le camp. C’était une pâle parodie du mode de raisonnement de Farida Belghoul, leadeuse de la mobilisation d’extrême droite contre les ABCD de l’égalité. Si si je vous assure, le logiciel me demande d’écrire leadeuse dans l’orthographe 1990.

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Évolutions de la langue française

Source : Libération, 26 septembre 2014.

Au-delà des réflexions sur les évolutions de l’orthographe Gilles Vervisch et Olivier Talon publient le Dico des mots qui n’existent pas et que l’on utilise quand même. Quel est le processus qui fait qu’un mot se crée, que son utilisation se généralise ? Les évolutions de la langue parlée feront-elles que ces mots disparaitront, ou au contraire trouveront leur place dans les dictionnaires ?

Des exemples : confusionnant, inhomogénéité, réjuvénation (pour un produit cosmétique), overbooké (plus fort que surbooké), préventeur (s’occupe de la prévention des risques), austéritaire, caller (pour appeler), forwarder (pour faire suivre), bilanter (faire un bilan), déconjugalisation (pour le divorce).

Je ne connaissais pas la plupart des mots que l’article cite.

Invasion par les anglicismes ? Manque de rigueur ? Ou au contraire créativité d’une langue vivante ?

Tous les siècles font entrer dans la désuétude et dans l’oubli un certain nombre de mots, tous les siècles font entrer un certain nombre de mots dans l’habitude et l’usage.

Oui bien sûr. À consommer cependant avec modération. Le verbe anglais "to support" est traduit par "supporter". On "supporte" un club de foot ! En français supporter est pénible : on supporte une douleur, un mari violent. Pourquoi pas tous simplement "soutenir" ? Bon, peut-être les amateurs de foot n’ont-ils pas envie d’être des souteneurs ?

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Le monde a faim

Source revue La recherche octobre 2014

Un rapport des nations unies montre que chaque année un tiers de la production alimentaire mondiale finit à la poubelle. Le record est atteint par les produits laitiers, gaspillés à 84 %.

Le même rapport précise que le gaspillage dans les pays occidentaux (95 à 115 kilogrammes par personne et par an) est bien supérieur au gaspillage dans les pays pauvres, (6 à 11 kilogrammes par personne.) La revue n’explique pas pourquoi ce décalage, pourquoi les pays riches gaspillent-ils plus que les pays pauvres ? ;- (

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Pourquoi les Français adhèrent au "salauds de pauvres"

Je me suis déjà demandé dans les lettres précédentes pourquoi nous sommes si agacés, par les abus que nous prêtons à nos voisins (ils touchent des indemnités abusives, ils sont chômeurs et ne cherchent pas de travail, alors que s’ils voulaient vraiment…) et pourquoi nous sommes si tolérants vis-à-vis des fraudes patronales.

Mediapart analyse cela plus finement que je ne l’avais fait. Je vous donne le lien, mais vous ne pourrez par lire l’article si vous n’êtes pas abonné. Je donne aussi quelques brefs extraits.

Mediapart salauds de pauvres

21 septembre 2014, Hubert Huertas : salauds de pauvres.

Coluche avait popularisé l’expression dans les années 1980, pour mieux la dénoncer. Les Français la reprennent en cette année 2014 mais plus pour rigoler. Voilà ce que révèle la dernière édition d’une étude que le Credoc publie depuis trente-cinq ans. Un résultat qui doit interpeler la gauche. […]

L’étude dont il est ici question n’est pas un sondage de circonstance, mais le trente-cinquième numéro d’une enquête que le Centre de recherche pour l’étude et l’observation a lancée dans les années 1980, et qui analyse, années après année, « les inflexions du corps social ». Alors que la pauvreté s’est accrue depuis 2008, notent les auteurs, Régis Bigot, Émilie Daudey et Sandra Hoibian, « la solidarité envers les plus démunis n’apparait plus comme une idée fédératrice de la société française ». C’est une brutale nouveauté. D’ordinaire, en temps de crise, les Français se montraient plutôt compatissants. […]

Dans l’enquête « Conditions de vie et aspirations », 64 % des Français pensent que « s’ils le voulaient vraiment la plupart des chômeurs pourraient retrouver un emploi » (six points de plus qu’en 2012). Presque un Français sur deux estime que « faire prendre en charge par la collectivité les familles aux ressources insuffisantes leur enlève tout sens de la responsabilité » (10 points de plus en deux ans, un score jamais atteint !). 37 % sont convaincus que les pauvres n’ont pas fait d’efforts pour s’en sortir (7 points de plus depuis 2012, 12 points de plus qu’au lendemain de la crise) ! […]

Première lecture : elle dirait le « réel ». Voilà ce que penseraient les Français, et ce qu’il faudrait mettre en œuvre pour gagner les élections. On devrait les écouter, pour satisfaire leurs « aspirations ». En finir avec les pauvres en les accusant de leur sort. C’est au fond ce qu’a fait François Rebsamen en remettant sur le devant de la scène le personnage obscur du chômeur fraudeur, qui abuserait de l’argent public. C’est aussi la lecture du Medef qui développe désormais des propositions impensables, et imprononçables, il y a seulement dix ans.

L’autre lecture, c’est que ces chiffres ne traduisent pas, ou pas seulement, une évolution de l’opinion des Français, mais aussi et surtout l’abandon des valeurs de la gauche par la gauche au pouvoir. Quelle grande voix est montée au créneau pour souligner, par exemple, cette vérité terre à terre : si le chômage est passé d’un million à plus de cinq millions en quarante ans, ce n’est quand même pas parce que les Français ont fabriqué en deux générations quatre millions de petits fainéants ? Dès lors, si les fraudeurs doivent être poursuivis, et condamnés sans ménagement, qui peut oser confondre le malade et la maladie ?

Et pourquoi, quitte à dénoncer les détournements d’argent public, le ministre du travail ne brandit-il pas, avec une vigueur décuplée, la fraude aux cotisations sociales pointée cette semaine par la Cour des comptes ? Elle atteint pourtant entre 21 et 24 milliards d’euros par an, et n’est pas le fait des chômeurs indélicats, mais du travail au noir mis en place par certains chefs d’entreprise, notamment dans le secteur du bâtiment.

Marre d’aider les pauvres… La question fiscale se profile naturellement derrière la lassitude des Français, et là encore le discours du pouvoir de 2012 s’est effacé derrière celui de la droite. Plus de réforme fiscale, comme promis, mais la reprise de l’expression « ras-le-bol fiscal », sur le mode bon élève. Bien sûr, personne n’aime payer ses tiers provisionnels et sa facture de septembre, mais comment, quand on est de gauche, oublier d’expliquer que l’impôt sur le revenu, qui est un prélèvement progressif (les plus riches paient davantage) ne résume pas toute la fiscalité ? Pourquoi en faire l’unique objet de tous les ressentiments ?

Pourquoi ne pas rappeler qu’il est d’autres prélèvements, plus diffus mais plus accablants ? Pourquoi ne pas souligner que les Français, tous les Français, paient davantage de TVA (où le smicard est taxé au même niveau que le patron du Cac 40) que d’impôt sur le revenu ? Pourquoi ne pas faire savoir, en toutes occasions, que ce qu’on appelle les « dépenses contraintes », comme le souligne le Credoc, se sont envolées par rapport aux salaires, avec le prix de l’immobilier, le loyer, le chauffage, l’électricité, l’autoroute, etc. Au nom de quoi les « dépenses contraintes » seraient-elles plus nobles, et plus caressantes, que les dépenses imposées ?

C’est très gênant de ne citer que des extraits, cela désarticule la cohérence. J’espère que, abonné a Mediapart, vous avec accès à l’ensemble.

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Fin de la lettre du 2014 9 27/27 septembre 2014

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Diffusion libre à condition de citer la source, [alerte] JM Bérard, et impérativement la date.

Le nuage de [alerte]

J’ai placé dans le nuage de [alerte] des textes et documents divers, avec le seul critère qu’ils me semblent intéressants et méritent d’être portés à votre connaissance. Cliquez, naviguez. Pour accéder au nuage cliquer sur :

Nuage de [alerte]

Fonctionnement de la lettre [alerte]

Inscription sur la liste de diff sur simple demande. On peut aussi se désinscrire. Les adresses des destinataires n’apparaissent pas lors de l’envoi.

jean-michel.berard orange.fr

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