[alerte] Jean-Michel Bérard

A savourer

* L'été dans nos montagnes

Je vous fais sentir le fumet d'un documentaire que vous ne pourrez pas savourer personnellement. Film de Bruno Axel Rad projeté à St Jean d'Arves, Savoie le 9 7 2014. Un parti pris astucieux et réussi : nous faire connaître divers lieux et activités de la montagne l'été en prenant pour guide les promenades d'un petit garçon de neuf an qui interroge les personnes qu'il rencontre, travaille (au moins dans le film) dans un refuge de haute montagne, monte pour de vrai (cela n'a pas dû être facile) au sommet du glacier de l’Étendard.

On connaissait, pour l'avoir vécu soi-même et vu déjà dans plusieurs documentaires, la description de l'élevage des vaches laitières et des troupeaux de moutons, la montée dans les chalets d'alpage, la vie de la bergère qui garde seule un immense troupeau de moutons. On (du moins moi...) découvre l'activité du cristallier qui sillonne la montagne pour trouver de beaux cristaux. Du chasseur qui, en suivant un plan de chasse défini par l'état, chasse les chamois et participe ainsi (c'est-ce que dit le film) à la préservation du cheptel en régulant le nombre de bêtes. On découvre la vie dans le refuge du club alpin français, touristes qui montent déjeuner en montagne et alpinistes qui dorment et se lèvent tôt le matin pour partir à l'assaut de la montagne. On découvre avec tristesse l'activité des glaciologues sur le glacier de l’Étendard. Pour diverses raisons, ce glacier est étudié depuis très longtemps, de nombreuses mesures y sont faites, et l'on nous explique que depuis les années 80 le volume de glace baisse plus rapidement qu'auparavant. Les simulations laissent prévoir que le glacier aura totalement disparu en 2080. Il y a bien longtemps sur ce glacier mon père, seul en montagne, était tombé dans une crevasse et en était sorti en creusant la glace avec son piolet. Au moins après 2080 on ne risquera plus ce genre d'accident.

Au fil des jours

* Défenseur des droits

J'avais dans cette lettre protesté contre le choix de F. Hollande visant à nommer Jacques Toubon défenseur des droits. Je vous avais aussi rendu compte des débats autour de cette nomination. Je vous dois un suivi : Jacques Toubon a été nommé défenseur des droits.

Dans l'avenir je vais cesser de protester contre les dérives droitières de F. Hollande. Il a clairement, en particulier en nommant Valls premier ministre, choisi d'assumer une ligne politique, économique et sociale que l'on peut qualifier « de droite ». Le site mediapart parle même d'une cohabitation, comme entre Mitterrand et Chirac, entre un président « de gauche » et un premier ministre « de droite ». Cohabitation assumée, sans même qu'il y ait eu d'élections pour changer la majorité. Inutile désormais de reprocher au président de ne pas tenir les promesses qu'il avait faites lorsqu'il était candidat de gauche.

* Objets communicants

La presse nous parle tous les jours de notre mode de vie, actuel ou très proche, induit par les objets communicants qui captent les données, les envoient par internet à des ordinateurs qui les traitent et nous donnent des conseils ou prennent des décisions. Pot de fleurs qui informe sur l'état de la plante, fourchette qui nous alerte lorsque nous mangeons trop vite, brosse à dents qui surveille notre façon de brosser nos dents, urinoirs qui, dans les boites de nuit, analysent le taux d'alcoolémie des clients (y aura-t-il au dehors de la boite de nuit des sirènes qui alertent lorsque l'on fait pipi dehors?), détecteur de fuites dans les couches des personnes âgées vivant en maison de retraite... Cela va faciliter notre vie ? Nous déresponsabiliser ? Conduire à une présence diminuée auprès des personnes âgées et des handicapés ? Quoiqu'il en soit le problème reste de savoir comment seront programmées ces machines, en fonction de quels critères ou de quels intérêts. Si nous n'y prenons garde, nous nous retrouverons dans un environnement d'objets dont nous ignorerons totalement les principes selon lesquels ils prennent des décisions pour notre bien.

* Israël et Palestine

Comme on pouvait hélas le prévoir, les conséquences de l'assassinat de trois étudiants israéliens (attribué au Hamas par le gouvernement d'Israël) et de l'assassinat d'un jeune palestinien par six israéliens (assassinat qui a été fermement condamné par le gouvernement d'Israël) conduisent à une escalade de violences réciproques.

Le Président sortant Shimon Peres et le Président élu d’Israël Reuven Riblin co-signent un appel aux Israélien et aux Palestinien pour l’arrêt des violences et des incitations : « Il est temps de faire un choix, ensemble. Il est temps de choisir ce qui nous unit, et non ce qui nous divise. Il est temps de croire en notre capacité à vivre ensemble, ici, sur cette terre. Nous n'avons pas d'autre choix, nous n'avons pas d'autres terre. Il est temps de prévenir la prochaine effusion de sang. La balle est dans notre camp ». Deux peuples, deux états ? Il semble hélas que l'on en soit encore bien loin. Il faudra encore beaucoup de temps pour que les deux présidents soient entendus, même si le nombre de partisans de la paix augmente petit à petit en Israël.

* Éducation nationale : redoublements

Le ministre de l'éducation nationale a pour projet de publier un texte interdisant les redoublements, sauf accord explicite des parents.

C'est un bouleversement dans la façon de fonctionner du système éducatif, où le redoublement est souvent considéré et vécu comme une menace, indépendamment de toute réflexion sur ses vertus pédagogiques. Le syndicat ultra-conservateur Snalc ne s'y est pas trompé, et tente par tous les moyens juridiques d'empêcher la réalisation de cette intention du ministre.

De nombreuses études ont montré l'inutilité pédagogique du redoublement. On affirme généralement (je ne l'ai pas vérifié par moi-même) que, en Finlande, le mot même de redoublement est totalement inconnu. Les élèves passent au même rythme dans la classe suivante, mais, dans la classe, des méthodes de pédagogie différenciée sont en place pour adapter l'enseignement à chaque élève. C'est rarement le cas en France où, le plus souvent, tous les élèves de la classe sont amenés à travailler sur les mêmes exercices au même niveau, ce qui impose évidemment le redoublement pour ceux qui ne pourraient pas « suivre » dans la classe supérieure.

Tout comme l'excellent projet de réforme de l'évaluation, je crains bien que le projet de diminution des redoublements ne soit voué à l'échec. Cette pratique est profondément ancrée dans l'esprit d'une forte majorité des enseignants et des parents. La mesure sera inévitablement prise comme une nouvelle forme de laxisme. Le gouvernement a en outre commis la maladresse d'insister sur le fait que les redoublements coûtent fort cher (par l'augmentation des effectifs d'élèves) : on lui reprochera d'avoir une logique purement comptable.

L'idée est excellente, il faudrait que tout soit fait pour qu'elle se réalise, en particulier en formant massivement les enseignants aux pratiques d'une pédagogie différenciée où, dans la même classe, chaque élève pourrait trouver un rythme de progression adapté à ses besoins.

Une remarque annexe : il est surprenant de soumettre le redoublement à l'accord des parents, comme si parents et enseignants étaient dans des camps opposés, indépendamment de la prise en compte des pratiques pédagogiques et de l'intérêt de l'élève.

* Sécurité routière

Extrait de la lettre d'information sur la sécurité routière publiée par le ministère de l'intérieur, 10 juillet 2014.

Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur, annonce 15 000 gendarmes et policiers au bord des routes le week-end du 14 juillet. (Notons une fois de plus le manque de précision que présentent souvent les données citées : 15 000, c'est combien par rapport à un week-end ordinaire ?)

L’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR) enregistre une légère hausse (+3,8%) de la mortalité routière (304 personnes ont ainsi perdu la vie sur les routes de France en juin 2014 contre 293 en juin 2013). À l’occasion des prochains départs en vacances, il apparaît plus que jamais nécessaire d’inciter les usagers de la route à rester vigilants et prudents afin d’éviter que la pause estivale ne se transforme en drame pour eux et leur famille.

15 000 gendarmes ! Nul doute que les associations de « défense » des automobilistes pas encore morts dans un accident vont protester contre cette répression féroce. D'autant plus que 7 morts de plus en un mois, ce n'est pas grand chose, surtout pour ceux qui ne les connaissaient pas et ne faisaient pas partie de leur famille.

www.violenceroutiere.org

Fin de la lettre du 2014 7 11/11 juillet 2014

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