[alerte] N° 89 - JM Bérard - 17 mars 2012

Sommaire

1 Fait divers ?

Accident d'autocar en Suisse

2 Au fil des jours

La fin du chômage

Les communicants

3 Ouvertures

Rubrique actualisée pour chaque numéro de [alerte]

Un poids particulier est mis dans ce numéro sur la rubrique « Ouvertures »


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Il vaut mieux penser le changement que changer le pansement.

F. Blanche

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1 Fait divers ?

Accident d'autocar en Suisse

Les questions que je me pose ne sont ni ironiques, ni provocatrices.

14 mars 2012, un accident d'autocar en Suisse : 28 morts parmi les enfants et enseignants belges et néerlandais revenant de classe de neige.

L'accident fait aussitôt la une des radios, 10 minutes en début de journal dans le 13h de France 2. L'émotion médiatique se poursuivra pendant plusieurs jours.

La Belgique est « sous le choc ». (Que veut dire cette expression, on n'en sait rien, mais cela montre bien la gravité de la chose.) Le premier ministre belge (tiens, il y en a un ?) affrète deux avions militaires pour se rendre en Suisse avec les familles. (On se croirait au début de l'excellent film « L'exercice de l’État », voyez-le s'il passe encore chez vous.)

Alors je m'interroge. Pourquoi une telle émotion médiatique.

Attention, je ne nie pas que l'accident soit dramatique.

28 morts ? Quel seuil et quelles particularités faut-il pour déclencher l'émotion médiatique ? Il y a chaque année plus de 3000 morts par accident sur les routes de France. Cela ne fait jamais la une. Il y a des milliers, des centaines de milliers de morts dans les tremblements de terre, les tsunamis, que sais-je encore. Cela déclenche moins d'émotion : il y en a trop, on ne peut s'identifier. Et puis, tout comme les massacres en Syrie, cela se passe dans des contrées étranges.

Le seuil médiatique a une fenêtre étroite : il doit concerner beaucoup de personnes, mais pas trop :: un autocar, un avion, un bateau sont la bonne jauge. Il faut que l'on puisse s'identifier, les parents attendant les nouvelles devant l'école, le bouquet de fleurs posé dans le tunnel. Il faut aussi que les envoyés spéciaux en direct puisse se rendre sur place, que l'on puisse avoir de l'image. Pour cela, la Suisse est idéale : une heure d'avion depuis Paris, il y a l'électricité, l'internet, de l'eau, des toilettes, tout ce que l'on ne trouve pas en Haïti après le séisme.

Beaucoup de spécialistes plus savants que moi se sont penchés sur le statut du fait divers. J'ai tendance à penser qu'un fait-divers n'a de sens collectif que s'il résulte d'un problème collectif. Dans l'accident d'autocar, peut-être faudrait-il s'interroger sur la pratique du « tout pour la route » qui est devenue la règle. Le fret circule à flux tendu dans les camions, la filiale fret de la Sncf est en difficulté. Pour les transports collectifs (colonies de vacances, etc.) l'autocar a supplanté le train ; il est plus commode car se il se rend de porte à porte. Sans doute faut-il penser aussi (mais il semble que ce ne soit pas le cas ici) aux cadences infernales imposées aux chauffeurs routiers.

Bon, j'arrête, je suis sous le choc.

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2 Au fil des jours

La fin du chômage

On le sait bien, le problème essentiel de notre société est que chacun puisse rester connecté.

On a du mal à le croire, mais c'est vrai. Comme les sans-domicile-fixe sont en général dans la rue, il suffit de les utiliser comme relai Wi-Fi. Aux États Unis, une agence à muni des sdf (volontaires) d'un petit relai Wi-Fi ; on les équipe ensuite d'un tee shirt voyant sur lequel est écrit « Je suis une borne Wi-Fi ». L'utilisateur qui se connecte paie deux dollars pour quinze minutes de connexion, somme reversée en principe au porteur du relai. Voici une magnifique couverture Wi-Fi, bien visible pour tous. Vous avez bien lu, il est écrit « je suis une borne wi-fi » et pas « je porte une borne wi-fi » ou « grâce à moi accédez au Wi-Fi. » Et alors ? Il y avait bien des gens qui marchaient dans la rue avec des pancartes publicitaires. Je ne sais pas pourquoi, mais je trouve que ce n'est pas pareil. Ne serait-ce que du fait du cynisme consistant à dire « les sdf sont dans la rue, profitons-en. » Un seul inconvénient : il serait ennuyeux de loger les sdf, cela nuirait à la couverture Wi-Fi.

C'est aux Usa. Cela ne peut pas venir à l'idée de quelqu'un chez nous.

Les communicants

On l'a mieux compris dans différents films ou séries télé récentes : Le filme excellent L'exercice de l’État, le feuilleton dont j'ai oublié le titre où Nathalie Baye est candidate à la présidence, ou encore Borgen. Les communicants, les « spin doctors » ont dans le fonctionnement actuel du politique un rôle essentiel : rédiger les discours, corriger les postures du candidat, trouver les formules choc, monter les coups médiatiques contre l'adversaire. Du coup, on reste un peu déçu de constater à quel point nous sommes pris dans ces techniques publicitaires. Et aussi plus critiques. Au lieu de paraitre brillante, une phrase comme celle de Fabius disant « Votre bilan, c'est votre boulet » apparait désormais comme un procédé.

Cela dit, je suis un peu perplexe en ce moment (16 mars 2012) devant la tactique des communicants de F. Hollande. Pour éviter de parler de son bilan, N. Sarkozy a pris le parti de désorienter, de donner le tournis : une ou plusieurs idées par jour (parfois contradictoires avec ce qu'il a fait ou dit jusqu'à maintenant, parfois même prises à Mélenchon...), une campagne de discrédit de l'adversaire, présenté comme mou, indécis, une anguille. Du joli travail. Oubliés le bilan, les promesses non tenues, voici un président tout neuf, avec des idées nouvelles.

Face à cela, il me semble que les spins doctors de F. Hollande n'ont pas trouvé le rythme. On s'épuise à répondre du tac au tac aux propositions de NS, ce qui brouille totalement la cohérence de ce que propose Hollande. On s'épuise aussi à répondre en ne mettant pas suffisamment en évidence les contradictions entre ce que dit NS et ce qu'il fait. Choisies pour désorienter, les propositions de NS en arrivent à faire oublier qu'il y a une différence entre la droite et la gauche, ce qui, venant d'un président aussi droitier est tout de même un comble. Peut-être FH devrait-il nous le rappeler.

Une précision : je ne suis pas candidat pour être spin doctor de F. Hollande, ce billet n'est pas une proposition déguisée...

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3 Ouvertures

Rubrique actualisée pour chaque numéro de [alerte]

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- Deux films :

Les nouveaux chiens de garde

De mémoires d'ouvriers.

Je n'en dis pas plus, vous avez entendu parler de des films dans vos médias favoris ou par vos amis. Juste pour vous conseiller, vraiment, d'y aller. Cela passe dans peu de salles et sans doute pour peu de temps.

Pour mémoire aussi : Tous au Larzac, Le Havre, Detachment.

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- L'univers Samsung, terrifiant, une secte, un monde, le meilleur des mondes de Huxley ? L'objectif extrême d'une société ou les valeurs « travail, compétition, profit » remplacent toute valeur humaine. A peine de la science fiction, hélas.

Samsung

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- Le blog desintox de Libération

La courbe du bobaromètre classe les candidats par nombre de bobards ; ce sont les affirmations des candidats contredites par les analyses sérieuses de la rubrique « intox désintox » de Libération. Une galerie de portraits permet d'un simple clic d'avoir accès aux bobards de chacun des candidats. Un travail utile, car le citoyen de base comme moi n'est pas du tout à même de faire tous les calculs ou de remonter à toutes ces sources documentaires permettant de démonter ces bobards.

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- Le blog Les décodeurs du journal Le Monde

Analyses fines des vérités et contre-vérités contenues dans les affirmations des candidats à la présidentielle.

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- Le blog de Claude Lelièvre

Article en ligne le 16 mars 2012

« Le » baccalauréat du petit Nicolas analyse des propos tenus par N. Sarkozy sur le baccalauréat dans son discours de Montpellier. Une négation totale de tout ce qui a été mis en place, par la droite comme par la gauche, depuis des décennies, et en particulier la revalorisation des bacs professionnels et des bacs technologiques.

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- Le blog de Gilles Raveaud

Un clip raciste produit par la Commission Européenne, ou comment la belle Europe blanche mate les vilains guerriers de couleur qui viennent jusque dans nos bras égorger la civilisation européenne. Étonnant. A la fin du film tous les barbares disparaissent, seules restent les étoiles de l'Europe. La conclusion du filme est « plus nous sommes nombreux, plus nous sommes forts. » Qui est ce « nous » ? Et plus forts contre qui ? Un soutien à l'universalité sans doute !

Financé par les citoyens européens.

Cliquer sur le lien Regards dans Le blog de Gilles Raveaud

Le site Regards que je découvre à cette occasion offre de nombreuses vidéos intéressantes.

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- Le blog d'un avocat, par Me Eolas (pseudo d'un avocat qui marque la blogosphère par la rigueur de ses analyses juridiques.)

Pour des non juristes comme moi, ses analyses sont un régal, tant elles induisent une réflexion approfondie sur la nature de la justice.

En ligne le 17 mars : le cas du maire condamné pour avoir giflé l'un de ses administrés. Même si a priori vous pensez que cela ne vous intéressera pas, essayez.

En incidente : chaque année la conférence du stage organise un concours de jeunes avocats qui doivent faire preuve de leur éloquence sur un sujet absurde. Au menu cette année : « cent tristes valent-ils mieux qu'un con plaisant ? »

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- Résistances et changement, JP Dacheux, JC Vitran

En ligne le 17 3 2012 divers articles, dont l'un sur la mise en place de la carte d’identité informatisée et un article intitulé « Les nouveaux barbares ».

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