[alerte] N° 56 JM Bérard 2 janvier 2011

Texte définitif, mise en forme provisoire

Sommaire du numéro 56

1 Humour

2 Alerte, indignez-vous

3 Au fil des jours

Veulerie

Faire part de naissance

4 Messages reçus

2011

2011

2011

1 Humour

 

J'ai retrouvé avec plaisir l'humour absurde de Pierre Dac, au demeurant grand résistant dont les émissions sur Radio Londres à destination de la France ont fait beaucoup pour saper l'image de l'occupant nazi. (« Radio Paris ment, radio Paris ment, radio Paris est allemand », sur l'air de la cucaracha).

 

Sébastien Bailly publie aux éditions « Mille et une nuits » un opuscule intitulé « Le meilleur de l'absurde ».

« Ce n'est pas parce qu'ils sont nombreux à avoir tort qu'ils ont raison » (Coluche). Aucun rapport avec le populisme ?

« On commence à se méfier de la transparence, elle cache trop de choses » (Yvan Audouard). Aucun rapport avec Facebook, les réseaux sociaux, la géolocalisation ?

« Que devient le trou quand le gruyère est fini ? » (Bertold Brecht). Que seraient la vie sans la mort, et la mort sans la vie ?

 

2 Alerte, indignez-vous

 

En 1998, Franck Pavloff publiait chez Cheyenne « Matin brun », petit livre de 11 pages qui décrivait de façon poignante la montée insidieuse et implacable du totalitarisme. Ce livre, sans publicité, par le seul bouche à oreille, connut et connait encore un nombre considérable de ventes.

 

Un phénomène analogue est en train de se produire avec « Indignez-vous !» de Stéphane Hessel, éditions Indigène, 32 pages, 3 euros. En trois mois, 500 000 lecteurs, sortie de la huitième édition en décembre 2010, tête des ventes devant le Goncourt. Excellente lecture, excellent cadeau à faire à de nombreux amis.

 

Remarquons que le « Manifeste des économistes atterrés » (Éditions Les liens qui libèrent, 70 pages, 5,50 euros) dont nous avions parlé dans une lettre précédente, connait lui aussi le succès et arrive lui en quatrième position des ventes.

 

Âgé aujourd'hui de 93 ans, Stéphane Hessel fut un grand résistant, échappé des camps de Buchenwald et Dora, co-rédacteur de la déclaration universelle des droits de l'homme en 1948, ambassadeur de France, militant infatigable de la justice et des droits de l'homme.

 

Pour Stéphane Hessel, le motif de base de la résistance est l'indignation : écart grandissant entre les très riches et les très pauvres, état des droits de l'homme sur la planète, sort fait aux immigrés et aux roms, course au « toujours plus », dictature des marchés financiers, liquidation des acquis de la Résistance tels que la sécurité sociale.

 

Le livre est écrit de façon dense, sans grandiloquence, ce qui peut conduire à ce que les affirmations les plus fortes apparaissent comme désincarnées. Et pourtant... Chaque phrase, chaque mot porte, et pourrait faire l'objet d'un ouvrage entier. Stéphane Hessel en appelle à l'indignation, pour une insurrection pacifique : « résister c'est créer, créer c'est résister ».

 

Stéphane Hessel et d'autres compagnons de la libération ont créé le mouvement « Citoyens résistants ». Stéphane Hessel présente les vœux de ce mouvement sur

 

http://www.dailymotion.com/video/xgcbml_les-vyux-de-stephane-hessel-pour-2011-sur-mediapart_news#hp-v-v5

 

« La première décennie de notre siècle s'achève sur un échec : échec dans la lutte contre la pauvreté, échec de la paix en Palestine, de l'équitable répartition des biens... Les motifs d'indignation sont nombreux. De quoi faut-il s'indigner ? De la complicité entre pouvoir politique et pouvoirs économiques et financiers... N'attendons pas, résistons. Vivent les citoyens et les citoyennes qui savent résister. » (Notes prises au vol, texte non garanti, voir la vidéo.)

 

Le site du réseau Citoyens résistants :

 

http://www.citoyens-resistants.fr/

 

En écho, le journal « Le Monde » des 1er et 2 janvier titre « Espérer, craindre, s'indigner. » Il demande à plusieurs personnalités « Et vous qu'est-ce qui vous indigne ? »

 

Quelques extraits, non exhaustifs :

 

Boris Cyrulnik neuro psychiatre : « Il faut nous demander de raisonner, et non de nous indigner ».

Jean-Marc Borello, fondateur du groupe SOS : « Je m'indigne de la passivité des politiques publiques vis à vis de la jeunesse... Cela va provoquer des catastrophes »

JF Rial, PDG de Voyageurs du monde : « Jamais je n'ai autant été choqué en politique que par cette affaire des roms. »

Françoise Héritier, professeur honoraire au collège de France : « Parmi les injustices monumentales, celles qui me révoltent le plus sont les injustices faites aux femmes ».

Catherine Pancol, écrivain : « Récemment rien ne m'a le plus indigné que ce que montre le film Inside Job, (nous en avons parlé dans une récente lettre [alerte]. Film qui vaut vraiment d'être vu, s'il passe encore). Le réalisateur met au jour les mensonges des grands banquiers, leur complicité avec de grands universitaires et la corruption des gouvernements. »

Alex Türk, président de la CNIL : « 2010 a été une année charnière au cours de laquelle les phénomènes liés aux usages du numérique, internet, et géolocalisation des personnes et des biens, etc. ont profondément modifié la donne en matière de protection de la vie privée et des données personnelles. »

Claude Alphandéry, président du laboratoire d'économie sociale et solidaire : « [Ce qui m'indigne] c'est la démesure extrême de l'accumulation financière, qui casse toutes les valeurs. »

Philippe Cury, biologiste : « Les razzias systématiques des ressources mondiales... [...] disparition programmée de ressources aussi vitales que l'eau, les terres arables, la biodiversité.»

 

Les citations non retenues ici méritent également toute notre attention, se reporter à l'article du journal.

 

3 Au fil des jours

 

Veulerie

 

La loi LOPPSI 2 (loi pour la programmation et la performance de la sécurité intérieur), après de nombreuses tergiversations, vient d'être adoptée par le parlement. Cette loi contient de nombreuses dispositions gravement liberticides, nous y reviendrons.

 

Pour aujourd'hui, je témoigne seulement du grand malaise que suscite chez moi l'assouplissement des règles concernant le permis à points, qu'il sera plus facile de « récupérer » lorsqu'on aura perdu tous ses points.

 

Démagogie, veulerie. Les études sont formelles : la réduction de la vitesse fait baisser de façon nette le nombre de tués et de blessés sur la route. Affaire de liberté personnelle ? Pas du tout : la vie des autres est en danger, de même que l'augmentation les frais entrainés pour la société par les blessures et les morts, sans ignorer bien sûr les drames familiaux et personnels.

 

Les raisons que chacun de nous se donne pour aller trop vite sont multiples et de mauvaise foi. Quant aux raisons qu'ont les hommes politiques de caresser lâchement leur électorat dans le sens du poil, elles en arrivent à faire regretter que en démocratie il y ait des électeurs. Je suis par exemple tout à fait ahuri par les maires qui font « sauter » les PV de stationnement de leurs amis, pour leur faire plaisir : ce sont les maires eux-mêmes qui prennent les arrêtés d'interdiction de stationner !

 

Extrait du communiqué de presse de la remarquable Ligue contre la violence routière :

 

« L'assouplissement du permis à points, inclus  dans la loi Loppsi 2 adoptée mardi en deuxième lecture par l'Assemblée  nationale, rend "impossible" l'objectif présidentiel de descendre à 3 000 morts par an sur la route en 2012, prévient la Ligue contre la violence  routière.
La Ligue "résistera à la démagogie et au populisme". "Contrairement au  gouvernement, elle ne cèdera pas à la pression d'une minorité qui dès 2002  s'est toujours opposée à la nouvelle politique de sécurité routière qui a  permis de sauver plus de 20 000 vies »

 

Site de la Ligue contre la violence routière :

http://www.violenceroutiere.org/ligue.php

Le bulletin de la Ligue contre la violence routière a pour titre « Pondération ». Abonnement 10 euros, 15 rue Jobbé Duval 75015 Paris.

 

Faire part de naissance

 

On apprend à la lecture du journal Le Monde du 23 décembre 2010 la naissance d'un courant au sein de l'UMP (le parti du président) : « La Droite populaire. » Ce regroupement de députés de droite assume sans complexe des thèses démagogiques et populistes proches de celles du front national : rétablissement de la double peine pour les étrangers condamnés (l'expulsion s'ajoute à la condamnation), assouplissement du permis à points pour défendre les automobilistes contre « l'oppression », extension des pouvoirs des polices municipales, etc. La nouveauté est l'émergence publique de ce groupe constitué. En perspectives de belles alliances UMP Front national lors des prochaines élections. L'objectif est « de ne pas laisser à d'autres (le FN, sans doute) le monopole de sujets attendus par l'opinion. » En clair : plutôt que laisser au FN le soin d'exprimer ses positions, exprimons-les nous-mêmes.

 

4 Messages reçus

 

En bonne déontologie, j'aurais du demander la permission des personnes qui m'ont envoyé ces messages. Il m'a semblé qu'ils ne contiennent rien dont la diffusion puisse porter atteinte à la vie privée des auteurs.

 

2011

 

Meilleurs vœux (il est encore temps) : tout ce que vous aimez et souhaitez

le possible et l'impossible

le rêve et le réel

la glèbe et les étoiles

les autres et nous

le beau et ce qui l'est un peu moins

ce qu'on voit et ce qu'on devine

ce qu'on croit savoir et tout ce qu'il nous reste à découvrir

2011

 

Le jour de l’an est l’occasion d’échanger des vœux,

Vœux de joie, de bonheur, de réussite, de santé …

Pourtant dans notre pays et ailleurs dans le monde, il y a toujours

Moins de liberté,

Moins d’égalité,

Et encore moins de fraternité.

Rajoutons un vœu en 2011

RÉSISTER !

Résister pour trouver des alternatives aux politiques injustes et dangereuses menées actuellement,

Résister pour redonner du sens à l’expression « vivre ensemble »,

Résister pour offrir un avenir heureux et prospère à nos enfants dans un monde vivable,

Résister pour donner de la vie à nos utopies,

Résister ……….

 

2011

 

Or nous, devons, pour cela, assumer nous-mêmes la liberté du mouvement, le retrait qui ne soit pas repli, la force diagonale, la faculté de faire apparaitre des parcelles d’humanité, le désir indestructible. Nous devons donc nous-mêmes — en retrait du règne et de la gloire, dans la brèche ouverte entre le passé et le futur — devenir des lucioles et reformer par là une communauté du désir, une communauté de lueurs émises, de danses malgré tout, de pensées à transmettre. Dire oui dans la nuit traversée de lueurs, et ne pas se contenter de décrire le non de la lumière qui nous aveugle"

Georges Didi-Huberman, La survivance des lucioles.

Fin de [Alerte] N° 56