[alerte] N° 48 - JM Bérard - 21 avrile 2010

Il est temps de revenir à un ordre un peu rationnel. Ceci est le numéro 48 de [alerte]. Vous avez reçu précédemment les numéros 46, 47, « 47 bis » et « suite au 47 bis ». On dirait des enfants jouant à cache cache. Voici enfin le N° 48 que vous attendiez tous (enfin, peut-être tous...)

Sommaire du N° 48

  1. Catastrophes en série : dans quel monde décidons-nous de vivre ?
  2. Alerte : la justice selon Nicolas Sarkozy
  3. Rectificatifs
  4. Citations et réactions de vous tous
  5. Des liens intéressants
  6. Bienvenue



1 Catastrophes en série : dans quel monde décidons-nous de vivre-?

Séismes en Haïti, au Chili, en Chine, inondations et victimes en Vendée, éruption d'un volcan et annulation de milliers de décollage d'avions...

Rassurez-vous, je ne pense pas que Dieu punisse Sodome et Gomorrhe pour leurs péchés, et je ne pense pas non plus, comme tel ayatollah iranien, que cela est du aux tenues impudiques des femmes.

Il demeure que les conséquences de beaucoup de ces phénomènes devraient conduire à s'interroger sur le fonctionnement de la société, en allant au delà de la critique facile et commode du rôle des experts, et au delà du simple bilan des coûts et des demandes d'indemnisation.

Éruption d'un volcan, émission d'un nuage de fumée. Devant un phénomène qui n'a pas vraiment de précédent, les experts conseillent de suspendre les vols. Qu'aurait-on dit, si un airbus de 500 passagers s'était écrasé ? Et puis voilà, trois jours après, les différents secteurs économiques concernés font leurs comptes, constatent que tout cela est bien coûteux, et commencent une campagne visant à discréditer les experts, campagne accompagnée bien sûr d'une demande de dédommagements en direction des gouvernements. C'est bizarre, l'industrie aéronautique ou l'industrie du tourisme n'ont jamais proposé de verser de l'argent aux gouvernements lorsque les affaires vont bien. Comme à l'habitude, profits pour le privé, risques pour le public.

Au lieu de discréditer les experts, ne devrait-on s'interroger sur la fragilité de notre société mondialisée, et se demander si là n'est pas la source des problèmes.

Mis à part Le Monde et Mediapart, je n'ai pas entendu de réflexion sur une société folle, où les cadres des entreprises ont besoin de faire l'aller et retour dans la journée à Madrid ou ailleurs pour une réunion de deux heures, où l'on fait venir les fraises d'Argentine en hiver, où les touristes genre Club Med envahissent et détruisent le monde en ne connaissant des autochtones que le sourire des serveurs pauvres qui garnissent des buffets surabondants, et où les entreprises travaillent à flux tendu, pour économiser la gestion des stocks, ce qui fait qu'au moindre problème de transport elles sont en chômage technique.

Deux catastrophes signalées par les média : la récolte d'huitres de Arcachon a été en partie perdue parce qu'on n'a pas pu l'envoyer pour le lendemain en Asie. Je pense effectivement que les paysans chinois n'y survivront pas. Quant-à l'équipe de l'émission de France Inter «Le fou du roi », elle est, avec son responsable Stéphane Bern, restée en perdition trois jours à Athènes. Dur métier. (Bon, d'accord, je pense qu'il y avait de l'humour dans leurs plaintes.) Le ministre Éric Besson, lui, n'a pas pu, pendant trois jours, renvoyer par charter des réfugiés Afghan. Que de drames.

Extrait d'un article de Hervé Kempf, Le Monde daté du 27 avril, à propos des touristes bloqués un peu partout : « Et puis s'agit-il de voyages ou de déplacements ? On m'a cité des tas de personnes empêchées de s'envoler vers l'Éthiopie, où elles devaient marcher quinze jours. N'y a-t-il pas quelque chose d'absurde à aller marcher 15 jours en Éthiopie ? « Oh, c'était si beau, et le contact avec la nature... On se désaltérait d'une simple gourde d'eau en contemplant le coucher du soleil. On retrouve les vraies valeurs, tu sais » ''
1,5 tonne de gaz carbonique l'aller et retour [qui plus est dans un pays où les habitants sont misérables, note de JM B].
Nous ne voyageons plus, nous consommons de l'éloignement. Le vrai voyage est lent, et les voyageurs sont ceux pour qui la route est une aventure, un danger et un espoir. Aujourd'hui, ce sont les travailleurs migrants

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2 Alerte : la justice selon Nicolas Sarkozy

J'avais espéré que les résultats des élections régionales conduiraient à une mise en sourdine de la réforme judiciaire, et en particulier de la suppression du juge d'instruction. Que nenni, la garde des sceaux relance les choses et affirme à nouveau la volonté de réforme.

Il y aurait tant à dire, tant d'articles à citer.

Je me limiterai à des citations extraites de deux articles de Mme Delmas-Marty, titulaire de la chaire « Études juridiques comparatives et internationalisation du droit » au Collège de France.

Mme Delmas-Marty vient d'éditer son dernier ouvrage en date, Libertés et sûreté dans un monde dangereux Seuil, La couleur des idées, 273 pages, 21 euros.

Mediapart, 9 mars 2010 : Réforme pénale : Delmas-Marty dénonce une dérive autoritaire de l'état de droit

http://www.mediapart.fr/journal/france/080310/reforme-penale-delmas-marty-denonce-une-derive-autoritaire-de-letat-de-droit

Mediapart, 9 mars, 2010 : La sûreté de l'État au détriment de l'individu compte rendu du livre paru.

http://www.mediapart.fr/journal/france/080310/la-surete-de-l-etat-au-detriment-de-l-individu

L'abonnement à Mediapart étant payant je ne sais si vous aurez accès en cliquant sur les liens. Si non, dommage, les article de Mme Delmas-Marty sont en général tout à fait fondamentaux. Bon, je ne dis pas du tout cela pour vous inciter à vous abonner, info gratuite ou payante, c'est un autre débat.

Extraits du compte rendu du livre de Mme Delmas-Marty

En votant la loi relative à la rétention de sûreté, « qui permet de maintenir un condamné en détention, après exécution de sa peine, pour une durée d'un an, renouvelable indéfiniment, sur le seul critère de sa dangerosité» les parlementaires français ont dû faire se retourner Montesquieu dans sa tombe, estime d'entrée de jeu Mireille Delmas-Marty. «Comment en est-on arrivé là ? C'est la question qui me hante depuis lors», confie la juriste en ouverture de son essai.

[…] Pour y répondre, elle s'emploie à comprendre comment, à la faveur de la montée en puissance du terrorisme international, un nouveau danger est apparu qui consiste à «perdre la démocratie au motif de la défendre», comme le dit la Cour européenne des droits de l'homme.

[...]«Le discours sécuritaire a brouillé la terminologie pénale, écrit-elle, car il autonomise la dangerosité par rapport à la culpabilité et sépare les mesures dites “de sûreté” des peines, fermant ainsi la boucle car la mesure de sûreté devient la négation du droit à la sûreté.»

[…] A partir de cet exemple le plus frappant, celui d'un homme demeuré en prison (en Allemagne) près de vingt ans après avoir purgé sa peine, Mireille Delmas-Marty évoque le possible risque d'une «déshumanisation du droit pénal : construit sur le couple culpabilité/peine, le droit pénal postule le libre arbitre, alors que le couple dangerosité/mesure de sûreté en est la négation.''

Cette confusion désormais à l'oeuvre entre culpabilité et dangerosité, qui conduit à substituer la sûreté (en son sens nouveau) à la peine, revient à «reconnaître à l'État un pouvoir illimité». De ce point de vue, «la situation est pire qu'à Guantanamo», juge Mireille Delmas-Marty, puisque là-bas les prisonniers peuvent contester leur détention par une requête d'habeas corpus.

[...]Au regard du tableau comparatif des droits positifs, la France apparaît comme une exception : loin d'avoir attendu le 11 Septembre pour prendre un très net virage sécuritaire, dangereux pour les libertés publiques, notre pays semble bien plus que n'importe quel autre avoir préparé de longue date le terrain. Mireille Delmas-Marty montre que c'est autour des années 1977-1978 que cela se joue, entre le Comité Peyrefitte de 1977, pour lequel la prévention (au sens classique) demeure la clé et le premier d'une considérable série de textes sécuritaires, la loi du 22 novembre 1978 qui crée une période sûreté incompressible, vite suivie de la fameuse loi Sécurité et libertés. [...]

Extraits de l'article « Réforme pénale : Delmas-marty dénonce une dérive autoritaire de l'état de droit »

A suivre dans un prochain numéro de alerte

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3 Rectificatifs

Fichier Stic

Durant la campagne électorale qui précédait les élections régionales, des élus UMP avaient diffusé des attaques vives contre le candidat PS dans le Val d'Oise, qu'ils présentaient comme un « multidélinquant récidiviste ». Comme beaucoup, j'avais pensé que ces affirmations provenaient d'informations résultant d'accès illégaux au fichier Stic de la police. Après enquête, il apparaît que la source était en fait un informateur au sein du tribunal de Pontoise.

Cela ne change rien aux critiques faites à la méthode détestable et illégale employée par les élus UMP, ni aux nombreuses critiques faites au fichier Stic, truffé d'erreurs et dont les accès sont fort mal contrôlés.

Grippe A H1N1

J'étais et je reste partisan de la vaccination individuelle, et ne regrette donc pas du tout de m'être fait vacciner contre la grippe A H1N1.

La décision du ministre de la santé en France a suscité des polémiques. Fallait-il vraiment pratiquer une vaccination de masse ? Dès le début de la pandémie, le professeur Gentilini, ancien président de la Croix rouge française, estimait que la situation ne justifiait pas une campagne de masse, et que les moyens ainsi dépensés ne seraient pas disponibles pour d'autres urgences.

http://www.lemonde.fr/planete/article/2009/08/06/pour-marc-gentilini-on-assiste-a-une-pandemie-de-l-indecence_1226376_3244.html

Avec le recul, l'organisation mondiale de la santé reconnaît que ses mises en garde surestimaient l'ampleur de la pandémie. De plus, il semble maintenant assuré que certains experts de l'OMS sont liés à l'industrie pharmaceutique.

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4 Citations et réactions de vous tous

Les climato-sceptiques : réaction de l'un de vous (un extrait de cette réaction avait été publié dans le [alerte] « suite au 47 bis)

« La campagne des Allègre et consorts me fait horreur, et si je suis armé pour y résister, c'est grâce à des vulgarisateurs comme Jancovici (ma bible a longtemps été le petit Jancovici-Le Treut sur l'effet de serre). Mais je pense que le silence dans les média sur le bouquin d'Allègre aurait été une grave erreur (comme interdire la parole raciste au lieu de la combattre). Pour des raisons évidentes, que tu analyses d'ailleurs, ça ne l'aurait pas empêché, au contraire, d'être un grand succès de librairie. Il dit à beaucoup de gens ce qu'ils espéraient tout bas. Si ce discours sort du bois, occasion idéale pour argumenter et convaincre, que les vulgarisateurs se remettent au travail. Certains climatologues, qui ne faisaient plus de vulgarisation sur le sujet, s'y sont remis. Le tort de la majorité des journalistes n'est pas d'avoir rendu compte du livre d'Allègre, mais de ne pas avoir systématiquement invité les climatologues en question à le contrer. Certains l'ont fait, et c'est une pédagogie beaucoup plus efficace, dans l'environnement actuel. La climatologie est une "science" à peu près aussi limite que l'astrophysique (une "histoire" avec des modèles, mais non expériences avec validation ou infirmation possible). Elle ne fonctionne pas comme une science "dure". Les climatos du GIEC disent ce qui risque fort de se passer et non ce qui se passera. Énormément de paramètres pas tous connus doivent être pris en compte et pourraient modifier les prédictions. Certains verts zélés, en matraquant des certitudes, leur font du tort et donnent des armes à Allègre et à certains mathématiciens et statisticiens (dont je ne me souviens plus du nom) qui ont trop beau jeu de pointer ce genre de faute "philosophique" et méthodologique. Qu'ils en profitent pour passer du mensonge est une autre affaire. La réponse intelligente (Jouzel et d'autres) est que ce qui risque fort de se passer est une raison largement suffisante pour agir, et d'urgence. Il serait dangereux de n'avoir que l'argument du réchauffement climatique par effet de serre et des ressources limitées en pétrole pour militer contre la "consommation de la planète" - la couvrir de routes et de lignes aériennes low cost, en détruire les richesses culturelles en déversant en tous lieux mêmes touristes et mêmes enseignes commerciales. Je tremble en pensant au jour où la photolyse biologique de l'eau (un analogue de la photosynthèse) permettra de remplacer le pétrole par l'hydrogène." Fin de la citation de l'un de vous

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5 Des liens intéressants


  • Le blog de JC Vitran et JP Dacheux

http://resistancesetchangements.blogspot.com/

  • Le blog de Jacques Fournier

http://jacquesfournier.blog.lemonde.fr/

Voir dans ce blog un rticle du 13 avril 2010 : « Du service public à l'économie des besoins »

  • Le blog de Gilles Raveaud pour l'économie politique

http://www.alternatives-economiques.fr/blogs/raveaud

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6 Bienvenue

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