[alerte] N° 32 - JM Bérard - 7 janvier 2009

Plan de la lettre

  1. Lueurs
  2. Au fil des jours, des lectures et des navigations
  3. Alerte : la démocratie vidée des outils de son exercice
  4. Citations et réactions de vous tous
  5. Les liens entre nous

Philippe Gelück a édité il y a peu de temps un nouvel album, "Une vie de chat" "Le chien de Goebbels et celui de Jean Moulin avaient la même affection pour leur maitre." "En période de crise, un métier d'avenir : fabricant de minerves pour vaches qui regardent passer les TGV."


« Je pense que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés que des armées entières prêtes au combat. Si le peuple américain permet un jour que des banques privées contrôlent leur monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleuriront autour des banques priveront les gens de toute possession,d'abord par l'inflation, ensuite par la récession, jusqu'au jour où leurs enfants se réveilleront, sans maison et sans toit, sur la terre que leurs parents ont conquise.» Attribué à Thomas Jefferson, 1802.
Si j'en crois l'encyclopédie en ligne Wikipedia, Jefferson était le troisième président des États Unis d'Amérique. C'était il y a longtemps.

Note a posteriori le 23 février 2009 : il semble que cette citation de Jefferson soit une pure invention propagée par le net. Il faut dire que c'était tout de même un peu trop beau. Cela dit, j'avais écrit "attribué à". JM B

Les vœux de nouvel an me laissent toujours un peu amusé. Ils ont un sens fort, car permettent de dire à l'autre : je pense à toi et te souhaite du bien. Mais ils n'ont guère de vertu magique. Et surtout, à bien y penser, chaque jour est le début d'une période de 365 jours. C'est donc chaque jour qu'il faut souhaiter la bonne année à ceux à qui l'on pense. Non, le raisonnement ne se transpose pas aux anniversaires.

Bonne année à tous.


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1 Lueurs

Au début de l'année 2009 du calendrier dominant, commencer en positif, par les lueurs et non par les alertes. Sur France Inter, Stéphane Hessel, l'extraordinaire militant des droits de l'homme que beaucoup d'entre vous connaissent, exprime sa confiance . L'histoire, dit-il, est faite d'ondulations, nous sommes en ce moment dans le pire creux, et allons donc nécessairement vers une remontée. L'avenir est propice à l'espoir et à la confiance. Stéphane Hessel décrit avec générosité toute l'action des militants, des associations, des groupes qui se créent et se multiplient. Il dit aussi, (même si, là, je suis plus dubitatif) les espoirs qu'il place dans la construction de l'Union Européenne.



J'en ai déjà parlé, je sais : Barack Obama a nommé dans son équipe plusieurs scientifiques, dont un prix Nobel. Pour moi, c'est une lueur. On tourne le dos à la "méthode" de GW Bush (qui est aussi hélas celle de Sarkozy). On abandonne la critique systématique des intellectuels, on quitte la technique consistant à gouverner par idées reçues réactionnaires présentées comme relevant du 'bon sens populaire", on va peut-être se mettre à étudier les questions, à réfléchir, à décider en fonction du réel. Partout dans le monde, des groupes, des institutions, des associations, des personnes existent, qui analysent et pensent. On se réjouira si le relais est un peu repris par les responsables politiques. Je sais, la personnalité du prix Nobel qui a été choisi par Obama fait l'objet de contestations dans les milieux écologistes, mais cela ne change rien au fond.



Et puis, en 2007, 816 500 naissances ont été enregistrées en France. Ce nombre annuel de naissances ne cesse d'augmenter dans notre pays depuis 1994. La France est en tête des pays d'Europe pour le nombre de naissances par habitant. Les statisticiens prévoient que cette augmentation va se poursuivre en 2009. Sans doute un signe de confiance dans l'avenir, d'autant plus que, désormais, la plupart des naissances sont décidées et désirées.



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2 Au fil des jours, des lectures et des navigations

Calendrier, temps et vie commune

2009 ? Entre les calendriers musulman, juif, chinois, que sais-je encore, je pense que le calendrier qui fait que nous sommes en 2009 doit être largement minoritaire sur Terre. Simplement, la nécessité de vivre ensemble fait que d'une façon ou d'une autre ce calendrier est devenu bien commun. Et puis c'est tout de même bien utile pour se rencontrer, habitants de la même Terre. C'est un esperanto du temps.



C'est aussi bien commode pour les amoureux qui se donnent rendez-vous, quoi que... Jacques Brel attendait Madeleine toutes les semaines à l'arrêt du tram 33, mais elle n'est pas venue. Il pourrait aujourd'hui lui donner rendez-vous en heures et centièmes d'heures (les ordinateurs n'aiment pas les minutes), en précisant la longitude et la latitude du point de rencontre, données par le GPS. Mais, avec tout cela, Madeleine viendra-t-elle davantage ? Sans doute l'homme préhistorique se posait-il la même question, sans montre à quartz ni GPS. Adam lui-même...



Je suis toujours frappé par l'évolution presque simultanée des modes de vie, des structures sociales et des techniques, les uns contribuant aux évolutions des autres. Dans une civilisation rurale, l'observation du Soleil suffisait. Le développement des liens sociaux a entrainé l'apparition du l'horloge du clocher, à laquelle chacun voit l'heure de son village, et des carillons marquant l'angelus du matin (au travail...), du soir, et le rassemblement de la messe dominicale. Les nécessités liées aux horaires des moyens de transports, puis à la synchronisation des machines électroniques, plus exigeantes que l'homme, font que l'on a progressivement conçu de nouveau moyens de mesure tels que, aujourd'hui, les horloges atomiques et qu'il a fallu prendre en compte des phénomènes liés à la théorie de la relativité, totalement imperceptibles pour l'être humain dans nos conditions de vie. Certaines montres, certaines petites stations météo que nous avons sur nos tables de nuit reçoivent l'heure d'un émetteur lointain, avec une précision telle que cela dépasse tout besoin relatif à notre vie quotidienne. L'outil de mesure, en ce qui concerne la vie quotidienne, est devenu plus précis que ce que l'on mesure.



Le messager (réel ou mythique) qui courut de Marathon à Athènes pour annoncer la victoire parcourut les 40 km en un temps de l'histoire n'a pas retenu. Il mourut à l'arrivée. Aujourd'hui, un ordre de vente à Wall Street bouleverse l'économie mondiale en quelques millisecondes. Personne n'en meurt, mais tous en sont atteints. Beaucoup attribuent à cette contraction du temps les désordres de notre monde. Mais bon, nous en sommes tout de même les acteurs.



L'heure c'est l'heure : il parait que, le 11 novembre 1918, sachant que l'armistice était à 11h, un officier se croyant patriote avait, par souci de panache, donné l'ordre à ses soldats d'attaquer à 10h, pour lutter jusqu'au bout. L'officier n'est pas mort, plusieurs de ses soldats oui. On n'a pas trouvé de tribunaux militaires pour le condamner pour bêtise criminelle. Peut-être a-t-il été décoré ? Après tout, Edouard Leclerc et Michel Leeb viennent d'être nommés dans la légion d'honneur, alors... Quant-à l'histoire de l'officier, j'ai peut-être un peu brodé autour d'un fait réel (un poilu a été tué à 11h le 11 novembre). C'est une belle histoire, non ?



On n'a même plus besoin de nos jours de synchroniser les horloges des combattants : les guerres existent à toute heure, puisqu'on ne les déclare plus. Dommage. Reste à synchroniser les horloges des rendez-vous amoureux Tant mieux. La littérature, la poésie ont encore un avenir.

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Espèce humaine et races

Décidément les questions relatives à l'espèce humaine sont bien complexes, tant la science évolue vite. J'avais cru pouvoir affirmer dans le numéro hors série "Créationnisme et évolution" que la notion de races dans l'espèce humaine n'avait pas de sens pour les scientifiques.



L'un de vous, tout à fait expert dans le domaine, m'adresse le texte suivant :



"Une remarque à propos de la notion de races humaines. L'absence de légitimité scientifique est argumentée de façon classique par André Langaney, expert très médiatique et mondialement reconnu sur le sujet : http://www.lemensuel.net/Evolution-et-races-humaines-que.html Les anthropologues semblent hélas moins catégoriques aujourd'hui... Il semblerait que des gènes caractéristiques pourraient être utilisés pour différencier les populations, héritage de leurs confinements passés. Ce n'est pas le concept qui est ou non scientifique, c'est l'usage qui en est fait. Races et racisme ne doivent pas être confondus. La science est étrangère aux droits de l'Homme, elle ne doit pas être appelée dans ce qui doit rester un débat humaniste. A trop vouloir appuyer l'égalité des Hommes sur des théories scientifiques, le risque est grand d'un recul brutal si quelques faits sont ré-interprétés. Au passage, voir dans l'interview de Langaney la faible part de la sélection naturelle dans l'évolution humaine, plus régie par le hasard du confinement de populations à faible effectif. Amitiés. "



Une citation de André Langaney, généticien, pensée déjà dépassée si l'on en croit le texte précédent : "On peut retenir que la diversité génétique humaine varie de manière continue, d’une population à l’autre, principalement en fonction de la géographie, de l’histoire des peuplements et des conditions écologiques de leurs lieux de résidence passés et actuels. Ce que l’on appelait types raciaux autrefois ne constitue que les extrémités idéalisées d’une variation continue. Au sens scientifique, il n’y a donc pas de races chez les humains, bien que beaucoup de caractères varient d’un individu à l’autre. La situation est différente dans d’autres espèces où des populations ont été séparées pendant longtemps et a sans doute été différente chez les humains fossiles. Les Néandertaliens constituaient au moins une race et peut-être même une espèce différente."



Sur http://www.netvibes.com/educnet-svt#Usages_des_TICE_en_SVT, voir l'onglet "enseigner l'évolution".

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Internet contrôle-t-il la pensée ?

Je vous avais signalé que le numéro alerte hors série que je vous ai envoyé a été refusé comme indésirable par ma propre messagerie. (Je vous l'envoie à tous, et aussi à moi-même). Plusieurs d'entre vous m'ont dit que leur messagerie a aussi classé cette lettre comme indésirable. De plus, j'ai constaté déjà à deux reprises (ce n'est pas systématique) que ma messagerie a classé la revue "Le café pédagogique" comme indésirable.



Je me suis posé des questions, l'un de vous, expert en la matière, m'a un peu mis sur la piste.



Le nombre de messages indésirables, qui brouillent la lecture de notre boite, est tel que la plupart de nous faisons fonctionner un filtre automatique. Il existe de nombreuses méthodes pour programmer ces filtres. Le problème est que, pour des raisons de concurrence industrielle, les vendeurs de filtres ne disent pas comment s'effectue le filtrage. Il est clair que, pour filtrer, le logiciel accède au contenu du message, qui perd ainsi sa confidentialité. Mais ensuite, on ne sait pas selon quels critères il travaille.



Pour ma lettre, j'ai fait des essais. Je l'ai envoyée à moi seulement. Refus. Donc le critère n'est pas le nombre de destinataires. Je me suis envoyé des messages contenant un ou plusieurs des mots alerte, créationnisme, évolution. Messages acceptés. Mais la lettre dans son ensemble est refusée.



Il me semble qu'il y a là un filtrage insidieux de la pensée, puisque je n'ai aucun moyen de connaitre les raisons pour lesquelles le message est refusé.

Les solutions ?

Ne pas utiliser de filtre, mais alors subir la masse des messages indésirables. Utiliser un filtre, mais demander tout de même à recevoir les messages indésirables dans un dossier particulier, et vérifier avant de supprimer. C'est je crois la solution la plus généralement pratiquée. Exiger des vendeurs qu'ils publient la façon dont les messages sont filtrés. Même si l'on s'organise pour le demander, la concurrence commerciale entre eux rend ce vœux utopique.



En connaissez-vous d'autres ? En savez-vous plus sur la question ?

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3 Alerte : la démocratie vidée des outils de son exercice

Quelques extraits d'un article de Loïc Blondiaux, professeur au département des sciences politiques de Paris I Sorbonne, Le Monde, date non notée.



Extraits :
"À quoi tient la démocratie ? A la possibilité pour chaque citoyen d'exercer son pouvoir de critique du gouvernement, à la garantie d'un débat public ouvert et informé, au contrôle incessant de la société sur un pouvoir qui ne saurait prétendre être autre chose que le délégataire temporaire d'une légitimité qui ne lui appartient pas. Mais pour s'exercer ces droits et ces libertés supposent l'existence et la préservation d'institutions réflexives capables de produire en toute indépendance, les données, les cadres d'analyse, les manières de pensée indispensables à la vie démocratique d'une nation. Or depuis quelques mois ce sont des pans entiers de cette infrastructure nécessaire aux libertés démocratiques qui sont démantelés."



À titre de dernier exemple en date, l'auteur analyse en détail la suppression de l'observatoire de l'environnement, qui privera les citoyens de données indépendantes sur la pollution de l'air, de l'eau, des sols, la détérioration du littoral. Il cite encore la prise de contrôle explicite par l'exécutif de l'audiovisuel public, les menaces sur l'indépendance de l'Institut de la Statistique et des Etudes Economiques, la suppression de l'épreuve de culture générale dans les concours d'accès à la fonction publique, les menaces sur l'enseignement des sciences économiques et sociales.



Il oublie me semble-t-il la suppression du Centre d'étude des revenus et des coûts, (en 1998 ?), organisme qui dérangeait en faisant trop apparaitre les inégalités.

Conclusion de l'auteur : "Dans un monde où les sources d'une contre expertise se seront taries, où les enfants seront éduqués dans l'amour du marché , ..., où les médias seront concentrés entre les mains d'une poignée d'industriels dépendants ou complices du pouvoir, serons-nous encore en démocratie ? Certes, il restera des élections, il restera des médias, comme dans la Russie de Poutine, mais la démocratie sera cliniquement morte."

Confirmation : extrait d'un article du mois d'octobre 2008 de la revue en ligne "le café pédagogique" :

"...À cette menace qui touche tous les services statistiques de l'Etat, Insee inclus, s'ajoutent des faits propres à la Depp. Service de la statistique et des é.... Le Comité se plaint que pas moins de 17 publications (des Notes d'information) soient gelées. Par exemple, les suppressions de postes ont été décidées alors que les prévisions de la Depp sur les évolutions du nombre d'élèves ne sont toujours pas publiées. Disons plus clairement les choses : elles sont censurées par le cabinet de Xavier Darcos.

C'est la qualité des études qui est mise en danger par les restrictions budgétaires et les décisions politiques. Sans des études sérieuses, sans la liberté de publication des chercheurs, le citoyen ne peut connaître les difficultés et les réussites de son Ecole. Il ne peut ni évaluer ni intervenir dans les politiques éducatives." (^haut de page)

4 Citations et réactions de vous tous

Les utopies réalisables

Message de l'un de vous. Vous pouvez me contacter pour mise en relation si vous le souhaitez. Remarque : au delà du texte fort intéressant, je ne connais pas le travail de cette équipe.

Je résume à grands traits, car je ne sais pas comment le texte que j'ai reçu a été écrit et ne parviens pas à le convertir au format de cette lettre.

"Un autre monde est encore possible, inventons maintenant le réel. Cycle de conférences, débats, expositions d'associations engagées. Où en est-on : écologie, pollution, énergie, surpopulation, politiques d'immigration, rapports Nord-Sud, crise financière, le mythe de la croissance. Où va-t-on : scénarios d'anticipation si rien n'est entrepris pour modifier notre comportement. Que faudrait-il faire ? Possibilités pour aller vers une civilisation respectueuse de tous. Que peut-on faire à l'échelle individuelle ? " (^haut de page)

5 Les liens entre nous

Sur le blog "Action publique" de J. Fournier

Deux articles sur un sujet qui me tient à cœur, mais que je n'ai encore jamais abordé dans cette lettre, la situation en Israël et en Palestine.

Présentation de la personne remarquable qu'est J. Fournier :