Lettre [alerte] N° 17 - 7 août 2008

Plan de la lettre 
1 Au fil des jours, des lectures et des navigations
Prenons garde aux idées préconçues
Les merveilleuses aventures de l'ultralibéralisme racontées aux enfant
Menace et légèreté au palais de Tokyo
Soutenons Mc Do ?
2 Alerte
3 Citations et réactions de vous tous
Val et Siné
Les liens entre nous
Lettre [alerte] N° 17 - JM Bérard -  7 août 2008 -
jean-michel.berard chez orange.fr remplacer chez par @

Vous faites partie d'une liste limitée d'amis, constituée de façon purement arbitraire, dont je pense que peut-être
mes préoccupations sur l'avenir de la démocratie et l'état de la société  (que ça ! ...) peuvent les intéresser.
Vous pouvez  sans problème demander à être rayé de la liste. Diffusion libre et bienvenue.  Réactions et contributions très bienvenues. JM Bérard
 
Je rédige et envoie deux lettres. L'une est décrite en objet par "[alerte]" l'autre par "[JM B] N° x  Informatique et société".
Certains d'entre vous reçoivent les deux, d'autres l'une ou l'autre seulement. Ceci est la lettre [alerte]
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Plan de la lettre 
1 Au fil des jours, des lectures et des navigations
Prenons garde aux idées préconçues
Les merveilleuses aventures de l'ultralibéralisme racontées aux enfant
Menace et légèreté au palais de Tokyo
Soutenons Mc Do ?
2 Alerte
3 Citations et réactions de vous tous
Val et Siné
Les liens entre nous
 
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1 Au fil des jours, des lectures et des navigations
 
Prenons garde aux idées préconçues
 
Le corps d'un petit garçon a été retrouvé dans une rue, tard le soir, frappé de quarante coups de couteau(x).
Selon France-Inter (authentique !), la police privilégie la piste criminelle.
Tout lecteur de Poirot et Sherlock Holmes sait pourtant qu'il faut se défier des pistes trop évidentes. J'en suggère donc quelques autres, pour aider la police à ne pas persister dans une impasse :
- la piste du rémouleur distrait : il a oublié, pointe en haut sur la chaussée, les quarante couteaux qu'il venait d'aiguiser pour le compte des quarante voleurs. L'enfant à vélo a freiné et est tombé sur les pointes des ustensiles. En revenant chercher les couteaux oubliés, le rémouleur n'a pas remarqué le corps de l'enfant. Son attention, déjà distraite naturellement, était en effet distraite  par une panthère noire qui, langoureusement allongée sur la chaussée, se reposait de sa fugue du cirque voisin  ;
- la piste de l'accident du travail : l'enfant rêvait de rentrer à l'école des arts du cirque et profitait du passage de la caravane pour se familiariser avec le numéro du lanceur de couteaux. Subjugué par la panthère noire langoureuse, le lanceur de couteaux a manqué ses quarante premiers jets. Dépité, il est rentré dans son mobil-home pour remplir les 27 exemplaires de la déclaration d'accident et les formulaires électroniques de demande de stage de reconversion ;
- la piste du suicide : l'enfant venait d'être refusé à l'école des arts du cirque car il roulait sur une bicyclette et non sur un monocycle. Un peu déçu, il s'est suicidé en se portant 39 coups bénins et un coup mortel. Le couteau qui traînait a été ramassé par le chien du rémouleur distrait, qui l'a rapporté à son maitre.
Stupéfaite par le triste comportement de son entourage et l'état lamentable de la société, la panthère noire langoureuse a préféré ne pas regagner le cirque et garder sa liberté, en renonçant aux avantages exorbitants du statut des intermittents du spectacle.
Question clé pour aider à résoudre l'énigme : pourquoi le chien du rémouleur distrait n'a-t-il pas aboyé, comme il se devait, lorsque la caravane du cirque est passée ?
Message à l'attention de la police : non non, ne me remerciez pas, c'est bien naturel.
 
En ces temps de maniement délicat de l'humour, j'exprime bien sûr toute ma tristesse aux parents, et tout mon respect pour le travail de la police dans cette affaire. Le texte ci-dessus se moque de l'expression "la police privilégie la piste criminelle", c'est tout. Cela dit, comme il fallait hélas s'y attendre, cette triste affaire a relancé l'idée du fichage généralisé des empreintes génétiques...
 
Les merveilleuses aventures de l'ultralibéralisme racontées aux enfants
 
Quoique, de nos jours, même les enfants ne gobent plus n'importe quoi.
 
Principes de base, rideau de fumée : il faut laisser jouer librement le marché. Chacun prend ses risques et que le meilleur gagne, c'est comme cela que l'économie fonctionnera le mieux.
Remarque : l'être humain ne fait pas du tout partie de cette définition, un peu rapide, mais généralement admise, du libéralisme.
Réalité : pertes pour le public, profits pour le privé. Et, pour récompenser les mauvais d'avoir pris des risques avec l'argent des autres, il faut aussi les indemniser.
Conclusion : qui y comprend quelque chose ? Circulez, sur le plan de la cohérence de la pensée il n'y a rien à comprendre, sauf que seul le profit mène le monde.
Appel angoissé : ce que j'écris a l'air d'un marxisme ringard et désuet, mais cela décrit assez bien ce qui se passe en ce moment. Je sais qu'il y a parmi vous des spécialistes de la question, dites-moi où je me trompe ?
 
Exemple 1 : les sociétés d'autoroutes françaises, appartenant à l'Etat, faisaient de gros profits. L'Etat aurait pu avoir besoin de cet argent pour développer les réseaux routier et ferré, les canaux. Mais il est intolérable qu'une société d'Etat fasse du profit. Les sociétés d'autoroutes ont été privatisées. Même F. Bayrou a désapprouvé.
 
Exemple 2 : Alcatel Lucent connait de grosses pertes financières, l'action a baissé (de 60% en un an, si ma mémoire est bonne), des milliers de travailleurs ont été ou seront  licenciés. Au bout de tout cela les dirigeants S. Tchuruk et P. Russo quittent l'entreprise. Avec bien sûr de très grosses récompenses pour leur mauvaise gestion. Pour ne pas choquer l'opinion, on appelle cela parachutes dorés, c'est plus poétique.
Une remarque faussement étonnée : plusieurs des blogs qui rendent compte de cette affaire parlent des pertes financières et de la baisse du cours de l'action, mais pas des licenciements. Il faut sans doute se limiter à l'essentiel.
 
Exemple 3 : la crise des supbrimes, qui, selon certains banquiers eux-mêmes, provient de la "cupidité" des banques, continue de saper les bases du système bancaire. Les banques n'avaient pas compris ( ! ) que prêter aux très pauvres à des taux très élevés ne peut pas marcher. Conclusion  : le congrès des Etats Unis d'Amérique (à majorité démocrate) vient de voter de très gros crédits publics, qui s'ajoutent à ceux qu'avait déjà débloqués la banque fédérale, pour sauver le système bancaire. Ces crédits sont présentés comme venant  en aide aux petits emprunteurs, en  fait ils seront surtout utiles pour soutenir les deux organismes financiers  qui en ce moment colmatent les fuites créées par la crise. Avec une franchise ahurissante, les financiers avouent : en 29, la crise s'est aggravée parce que l'argent public n'est  pas venu colmater les dégâts, il ne faut pas rééditer les mêmes erreurs, l'argent public doit éviter la crise. Certes, personne ne peut souhaiter que tout le système bancaire international s'effondre. Mais comment avouer plus clairement que les profits sont pour le privé et les risques pour le public ? On peut y aller sans crainte, si cela ne va pas, l'Etat compensera. Bizarre pour des milieux qui passent leur temps à pester contre l'Etat lorsque celui-ci veut prélever des impôts, et qui ne sont pas gênés du tout lorsque l'Etat leur donne de l'argent (provenant des impôts).
 
Exemple 4 : l'affaire Tapie, qui vient de recevoir de l'Etat beaucoup d'euros pour solder ses "droits" dans la crise du Crédit Lyonnais. J'hésite à classer cela dans l'ultralibéralisme. Ce qui était ultralibéral c'était, au moment de la crise du Crédit Lyonnais, de créer une structure financée (énormément) par les contribuables pour racheter les pertes du Crédit Lyonnais. Là encore, l'Etat était le dos au mur : on ne pouvait  pas laisser s'effondrer le système bancaire français. Profits pour le privé, risques et pertes pour l'Etat, business as usual. L'actuel scandale Tapie n'en est que le prolongement.
Quoiqu'il en soit, d'après les journaux que je lis, le président est intervenu pour demander, dans l'affaire Tapie, l'application d'un système d'arbitrage qui ne devrait jamais s'appliquer lorsque sont en jeu des capitaux publics. Je ne suis dans aucun secret, évidemment, mais je suppose que B. Tapie sait, lui, beaucoup de choses qu'il a la gentillesse de ne pas étaler sur la place publique pour peu que l'on soit gentil avec lui.
 
Menace et légèreté au Palais de Tokyo
Extrait du blog de Joachim Séné. Avec l'accord de l'auteur  
http://journalecrit.20six.fr/journalecrit/art/87269655

Bouteilles de bières vides lancées à 600 km/h par un canon équipé d'un chargeur d'environ 16 bouteilles. Propulsion par azote compressé.
Dans une cage métallique et plexiglas (environ 4x20 mètres sur 3 de haut) cadenassée qui protège les visiteurs, l'appareillage tire sur une cible noire métallique dont les pieds sont recouverts du bris verre des bouteilles, et dont le centre est usé, non plus noir mais cercle gris. Environ toutes les dix minutes : chargement d'une bouteille et quelques minutes plus tard : tir. Fracas, explosion. Moins d'une seconde.

Rien que de la voir, cette œuvre, cette arme, au repos, et de comprendre ce que c'est : l'inquiétude, une tension, l'adrénaline, viennent. Sentiment d'être menacé, vulnérable.

Inquiétant car c'est une œuvre dangereuse, entourée de toutes les précautions et uniquement pour cela inoffensive. Sa présence angoisse pourtant, d'autant plus que la machine est longtemps calme, immobile et silencieuse mais avec tous les signes de sa puissance au repos : les seize grosses bouteilles d'azote, les câbles, le bouton «arrêt d'urgence», la cible usée en son centre, le plexiglas et la grille protecteurs, les tessons pulvérisés jusqu'à plusieurs mètres de la cible et jusqu'à trente ou quarante centimètres d'épaisseur, le bruit de la détonation. Et encore plus que tout cela, ce qui provoque la calme frayeur, malaise incertain : nous, attendant la détonation, ne sachant pas quand elle surviendra, prêt à sursauter à chaque instant, d'autant plus lorsqu'on l'a entendu une première fois sans rien voir alors qu'on était dans la pièce d'à-côté en train de regarder et de contourner l'éléphant Würsa à 18000 kilomètres de la Terre, léger, posé en équilibre dans le musée sur le bout de sa trompe. Fin de l'extrait du blog de Joachim Séné

Soutenons Mc Do ?
 
Source : rue89 02/08/2008
Je suis perplexe, vraiment. Le maire de Los Angeles, USA, a l'intention  d'interdire la construction de tout nouveau fast food, ce qui vise en particulier les Mc Do. Cela au nom de la lutte contre l'obésité et de la préservation de la santé publique. Cette interdiction concerne en fait une zone géographique où vivent principalement 500 000 personnes classées comme pauvres. Dans cette  zone, au final, aucun fast food n'existera. Le but du maire est de favoriser l'implantation  de commerces alimentaires variés et en particulier d'épiceries vendant des légumes. L'auteur de l'article remarque "Mc Do dans les quartiers blancs, oui,  dans les quartiers noirs pauvres, non".
 
Dans la logique des lettres précédentes, je devrais me réjouir : enfin on protège les pauvres contre le poison de l'industrie agro alimentaire, tout comme on interdit les distributeurs de barres chocolatées dans les établissements scolaires (bonne mesure, à mon avis), et que l'on protège les usagers de la route en limitant la vitesse (très bonne mesure à mon avis).
Et pourtant, cette interdiction des Mc Do me laisse perplexe, sans que je sache trop pourquoi. Il faudrait, si je le connaissais, que je demande l'avis de José Bové.
 
Bien que l'association d'idées soit un peu hasardeuse, on retrouve, selon Libération, un problème analogue en Inde avec la construction de voitures à très bas coût. Si l'on n'en fabrique pas, on prive des millions d'indiens à revenu modeste de l'accès à la voiture. Si on en fabrique, on va augmenter une pollution déjà considérable et un encombrement des villes spectaculaire .
 
Remarque scientifique : Libération, journal sérieux, ajoute que "à Bombay, un trajet de "quelques" kilomètres prend "déjà plus de deux heures". Peut-on obtenir un résultat précis à partir de données imprécises ? Un trajet de trois fois quelques kilomètres prendra-t-il six heures ? Trois fois rien, selon Devos, c'est déjà quelque chose, mais trois fois quelque chose ?
 
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2 Alerte
 
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3 Citations et réactions de vous tous
 
Val et Siné
 
Mes quelques propos sur Val et Siné ont provoqué chez vous plus de réactions qu'aucun autre article paru dans cette lettre. Quant au site Rue89, cette affaire a suscité au moins quatre articles, et des centaines de réactions passionnées des lecteurs (en général assez haineuses contre Val, je dis bien haineuses, et pas seulement critiques).
Je suis épaté. Pourquoi tant de passion à ce sujet, et pas sur le fichier edvige, le dopage dans le tour de France, la réforme excluant la Cimade des centres de rétention pour immigrés, la diminution du quota obligatoire de logements sociaux locatifs dans les communes, la réforme qui aggrave la condition pénitentiaire sous prétexte de l'améliorer, que sais-je encore ?
Je vous assure, je ne joue pas les naïfs, je suis un peu étonné. Je ne parle pas du fond de la question, (Siné "coupable" ? Val "coupable" ? ) mais de la passion que cette question, au total apparemment un peu secondaire, a suscitée. Je m'inclus dans la liste, j'ai posté plusieurs messages sur Rue89 (ce que je ne fais pas d'habitude) et envoyé plusieurs message à Charlie.
 
Sécurité routière
 
Réaction de l'un de vous
J'apprécie les effets de la sécurisation routière. Mon épouse a été accidentée dans les années 80 et cela a eu des retentissements sur sa propre vie et par ricochet celle de ses proches. La trajectoire de la voiture folle devenue boule de billard est allée bien plus loin que le bas-côté de la route, jusqu'à l'intérieur de notre vie familiale.
 
Les liens entre nous
 
En cours : signature de l'appel contre le fichier informatique edvige, http://www.nonaedvige.ras.eu.org/ .
Il y a un peu urgence, si vous souhaitez signer faites-le maintenant.

* Blog de Bernard Maris, professeur d'économie, chroniqueur à Charlie Hebdo et France Inter
Un peu décevant ces derniers temps.
* Blog du linguiste LJ Calvet
J'aime beaucoup, sauf son récent article sur Siné.
* Claris
http://blog.claris.org/ entre autres, un article sur le fichier edvige.
* La vie des idées
* Education financière
* Prochoix, Caroline Fourest
* La revue Ravages, éditée par l'association "Les amoureux des genres humains" est en vente sur commande dans les librairies.
* Ligue contre la violence routière
 
Je laisse volontairement un espace.
 
 
C'est vraiment très bien fait, si l'on aime ce genre là. Peut-être est-il utile de comprendre aussi comment pense F. Desouche ?
Décodage, mais vous aviez compris : une association de soutien aux immigrés, très minoritaire, a décidé d'appeler "souchiens" les "Français de souche". Le ministre Hortefeux a protesté contre ce jeu de mots injurieux pour la France, la vraie. Et un groupe de gens "fiers d'être français" a lancé de blog de François Desouche.
 
Je copie ci-dessous un extrait de ce site.
J'ai effacé la fin du tableau, non pas parce que c'était pire que le début (impossible) mais parce que bon, pour avoir une idée de ce que c'est, l'échantillon est suffisant.
 
En cette période où les notions d'humour et de satire posent problème, je précise premièrement que je ne partage aucune des idées exprimées ci-dessous, et deuxièmement qu'il me semble absurde de soutenir par principe l'humour et la satire, car cela dépend de ce que l'on dit. 
 
 
"Alors que le français disposait pourtant du mot “civique”, adjectif usuel correspondant au nom “citoyen” (du latin civicus), la gauchocratie a accouché d’un monstre : l’adjectif “citoyen”, remarquable perversion du sens originel et utilisé dans l’unique but d’éradiquer la contestation. La nouvelle notion de “citoyen” rappelle fortement celle de “socialiste de type nouveau” développée par les communistes dans l’ancien bloc soviétique.
• entreprise citoyenne qui pratique la discrimination positive
• comportement citoyen aide aux clandestins
• manifestation citoyenne manifs de RESF, de SOS racisme et de la CGT.
• projet citoyen payé par des subventions
• association citoyenne qui comporte le minimum possible d’adhérents français
• quartier citoyen ensemble d’habitations où les de souche sont minoritaires
• école citoyenne qui soutient RESF
• vote citoyen vote de gauche (surtout anti droite nationale)
• mariage citoyen mariage homo
• vacances citoyennes visite d’un pays du tiers-monde (accessoirement : faire rôtir sa graisse au milieu de la misère)
• maison citoyenne subventionnée et ouverte à tous
• Travail citoyen aide à une association tiers-mondiste ou prônant le métissage
• film citoyen qui montre le comportement odieux des français en Algérie
• chanson citoyenne chanson dénonçant le racisme
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