[alerte] - JM Bérard - 23 février 2018

Table des matières

[alerte] - JM Bérard 23 février 2018

Jeux olympiques

Le tour de la France par deux enfants

Commerce des armes

Fin de la lettre du 23 février 2018

 

 

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Ce texte est écrit dans l’orthographe recommandée 1990

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Jeux olympiques

Vous le savez, les jeux olympiques d’hiver se déroulent en ce moment dans la capitale de la Corée du Sud, que tout le monde en France appelait jusqu’à maintenant Pyong Yang et que l’on écrit et prononce désormais différemment lorsqu’on parle des JO. Toujours la même question : doit-on adopter la prononciation du pays, ou considère-t-on que, en France, notre histoire conduit à dire Londres et pas London ? Lors d’une compétition qui avait lieu au Brésil, à Sao Paulo, les responsables des radios publiques françaises avaient demandé aux journalistes de prononcer Sao Paulo, et pas quelque chose proche de San Paulo (Saint Paul), prononciation luso brésilienne.

Libération, le 22 février 2018, page 20 : du curling au slalom, des JO très techno à Pyeongchang. Page 30 : de Pyongyang à Séoul, l’envers des Corées.

Pour ma part, je reste partisan d’utiliser l’histoire de notre langue. J’avais été très agacé quand on avait voulu faire plaisir à la Biélorussie en l’appelant la Belarus !

Bon quoi qu’il en soit, chaque fois que je zappe à la télé je tombe sur des épreuves de biathlon où il faut à la fois aller très vite en ski et tirer très bien à la carabine sur des cibles. Qu’est-ce que cela a à faire dans des épreuves sportives ? Ne serait-ce pas mieux à sa place dans l’entrainement des militaires des bataillons de chasseurs alpins ?

Anecdote : les athlètes russes ont été globalement sanctionnés pour le dopage qu’ils ont, dans de précédentes épreuves, pratiqué de façon institutionnelle, semble-t-il au niveau de l’État. Ils concourent sous une bannière neutre. Eh bien oui, plusieurs athlètes concourant sous cette bannière ont été pris pour dopage dans les présents jeux ! Au moins cela ne nuira pas à l’image de la Russie.

En ce qui concerne le dopage je n’ai rien de particulier contre la Russie. Le jeu pour tous les sportifs est de prendre des médicaments (y compris prescrits par des médecins) qui ne sont pas encore détectables ou qui ne sont pas encore interdits. Pourquoi la Russie se fait-elle prendre ? J’ai déjà ici publié des articles montrant que le dopage gagne, en France, les jeunes sportifs amateurs, football, cyclisme. C’est très préoccupant. Bon on ne les dope pas à l’alcool ni, je crois, au hachich. On peut les présenter comme des modèles à tous ces jeunes qui tiennent les murs et qui, eux, fument du hachich. Cela me rappelle tout à fait le sketch de Coluche où un père très aviné fait des reproches à son fils fumeur de hachich.

Le tour de la France par deux enfants

J’ai travaillé durant tout mon cursus dans l’éducation nationale. Sans être du tout un spécialiste, je pensais m’intéresser raisonnablement à l’histoire du système éducatif. Me voici tout désappointé : je découvre, à mon âge, le livre « Le tour de la France par deux enfants ». (Attention : de la France, pas « de France ».) Je l’avais peut-être lu, mais n’en avais pas compris toute la portée dans l’histoire du système éducatif.

Je suis en train de lire avec un grand plaisir une édition 1907, destinée aux enseignants. Je vous en reparlerai, car dans cette lecture tout est sujet à admiration pour la qualité du travail et sujet d’étonnement sur certains contenus.

Quelques premières remarques :

Ce livre rassemble, grâce à la narration vivante du voyage des deux enfants, tout un ensemble de connaissances historiques, géographiques, scientifiques, sociologique concernant la France, et aussi tout une conception morale très détaillée, illustrée par des maximes. Il est destiné aussi bien aux élèves de fin d’études primaires qu’aux enseignants puisque l’édition pour enseignants comporte de nombreux paragraphe de formation des enseignants. Ce qui est remarquable est que l’on ait pu, pendant si longtemps, trouver ainsi un consensus national tant sur les connaissances que sur les valeurs. Ce consensus est, en 2018, quasi impossible. Ce qui est remarquable aussi est sa longévité, avec quelques modifications au fil des éditions : première édition 1877, il restera utilisé dans les écoles jusqu’en 1950, et a été ensuite lu par beaucoup, sans doute par vous. Cela me laisse perplexe. J’étais allé il y a bien longtemps à un congrès en Tunisie et avais été un peu choqué par le fait d’apprendre qu’il existait un manuel officiel. Je suis en ce moment très critique devant les manuels « officiels » que pense créer le ministre sous l’égide des neurosciences. Et pourtant, en France même, et je l’ignorais, le Tour de la France par deux enfants, très cadré, était utilisé partout.

J’en reparlerai dans les prochains numéros de alerte, car je trouve cette lecture, avec le recul, tout à fait passionnante.

Surprise : le livre a pour auteure une femme, Augustine Fouillée (née Tuillerie), qui a pris pour pseudonyme G. Bruno, en hommage à Giordano Bruno, poursuivi et conduit au bucher par l’Inquisition pour divers « crimes » d’hérésie, dont le fait de soutenir les thèses de Copernic selon lesquelles la Terre n’est pas le centre du monde.

Commerce des armes

La France fait partie des cinq pays les plus exportateurs d’armes. Une association humanitaire catholique s’inquiète : la France vend des armes à des pays qui les revendent ensuite à des pays ou des groupes qui en font un usage contraire au droit de la guerre et aux droits de l’homme : bombardement de populations civiles, d’écoles, d’hôpitaux. (Je suis toujours un peu perplexe devant l’expression « droit de la guerre ».) Selon l’association humanitaire, cela est contraire aux principes internationaux qui régissent les ventes d’armes. C’est vrai. Mais les apparences sont sauves : les pays auxquels la France vend les armes n’en font pas eux-mêmes un usage contraire aux droits de l’homme. Et puis il faut bien vivre. Arguments : si nous ne vendons pas nous-mêmes, d’autres le feront. Et puis, dans une période de chômage, peut-on se permettre de menacer l’emploi dans l’industrie d’armement ? (Peut-on se permettre de fermer Fessenheim, d’interdire le glyphosate… ?) En fait, ce que je ne comprends toujours pas est pourquoi, depuis les origines de l’humanité, la guerre fait partie des usages sociaux.

Fin de la lettre du 23 février 2018