[alerte] - JM Bérard - 19 mai 2018

Table des matières

Un livre

Éric Vuillard, L’ordre du jour, prix Goncourt 2017

Attentat

RGPD, protection des données personnelles : pourquoi je trouve que c’est un important progrès démocratique

Protection des données personnelles : conséquences pour les particuliers

Israël, Palestine, Histoire et présent

Profit du capital, rémunération du travail

Fin de la lettre du 19 mai 2018

 

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Texte revu par le logiciel correcteur Robert,

option « orthographe rectifiée 1990 »

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Un livre

Éric Vuillard, L’ordre du jour, prix Goncourt 2017

Je voudrais être vraiment écrivain, critique littéraire pour pouvoir dire la densité et la force du style, à la fois solide comme du bois, précis comme un scalpel, charnel, intense et froidement bouleversant. Éric Vuillard a écrit des romans, réalisé des films et des scénarios.

https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ric_Vuillard

L’Ordre du jour décrit la guerre de 39-45, depuis une réunion des vingt-quatre chefs des grandes industries allemandes avec Hitler et Goering au Reichstag en 1933, où ils ont sans hésiter largement financé, dans l’intérêt de l’économie et de l’Allemagne, les campagnes électorales d’Hitler, jusqu’au procès de Nürenberg. Un énorme travail d’historien, des moments romancés tissé sur un fil historique rigoureux ? Je ne suis pas assez compétent pour le savoir. Sans aucun doute une documentation très méticuleuse. Au moment du coup d’envoi des hostilités militaires, l’invasion « triomphale » de l’Autriche par Hitler (Anschluss), les chars allemands sont-ils vraiment restés en panne une journée au bord de la route ? Le couple Ribbentrop, invité à diner chez Chamberlain le soir de l’invasion de l’Autriche s’est-il volontairement attardé pour retarder les réactions de l’Angleterre ? Au tribunal de Nürenberg, Ribbentrop et Goëring ont-ils éclaté de rire lorsqu’un compte rendu d’un de leurs échanges intercepté par des espions au moment de l’invasion de l’Autriche est lu et montre qu’ils ont l’un et l’autre traité cet évènement de « merveilleux ». Au tribunal de Nürenberg ! Merveilleux. Ils ont éclaté de rire. Le fils Krupp a-t-il après la guerre d’abord versé 1250 dollars à des rescapés des camps (qu’ont-ils faits avec seulement 1250 dollars ?) pour au bout d’un temps ne plus rien verser du tout parce que les juifs avaient couté trop cher ? Histoire, des compléments vraisemblables (les hommes d’affaire en costume qui attendent Hitler et Goëring essuient la transpiration de leurs cols de celluloïd), rassemblement considérable de documentation : c’est extraordinairement prenant, crédible, bouleversant par sa narration sèche. On sent que l’on est dans les lieux, que l’on vit charnellement et émotionnellement ce qui se passe. Sur des scènes, un tout petit peu romancées ou pas, les analyses économiques, politiques, sociales sont d’une rigueur redoutable. Jusqu’à ce qu’on me prouve le contraire, je pense qu’il s’agit d’un remarquable travail historique.

Citation : (Un soir de 1944, au diner) soudain le vieux Gustav Krupp (l’un des 24) se leva. Il avait depuis longtemps sombré dans une imbécilité sans retour. Incontinent et gâteux, il gardait depuis des années le silence. Pourtant, ce soir, au milieu du repas, il se dressa brusquement et, serrant sa serviette contre lui d’un geste plein d’effroi, il tendit un long doigt maigre derrière son fils et marmonna « mais qui sont tous ces gens ? » Sa femme se retourna, son fils fit volte face. Ils eurent très peur. Le coin était plongé dans l’ombre, on aurait dit que l’obscurité remuait, que des silhouettes rampaient lentement dans le noir. Mais ce n’étaient pas les fantômes de la villa qui le glaçaient d’effroi, non, ce n’étaient ni les lamies ni les larves, c’étaient de véritables hommes avec de vrais visages qui les regardaient. Il vit d’énormes yeux, des figures qui sortaient des ténèbres. Il eut une peur affreuse. […] Et ce qu’il vit, ce qui surgit lentement de l’ombre, c’étaient les dizaines de milliers de cadavres, les travailleurs forcés, ceux que la SS lui avait fournis pour ses usines. Ils sortaient du néant. Pendant des années il avait loué des déportés à Buchenwald, à Flossenburg, à Ravensbrück, à Sachshausen, à Auschwitz et bien d’autres camps. Leur espérance de vie était de quelques mois. Si le prisonnier échappait aux maladies infectieuses, il mourait littéralement de faim. (Suit toute une liste de très grandes entreprises allemandes qui pratiquaient de la même façon.) Tout le monde s’était jeté sur la main-d’œuvre bon marché.

JM B : Je ne peux pas citer toute la fin de ce passage impitoyable pour le capital. Je savais pour les fours à chaux, pour cela je ne savais pas du tout. Les entreprises citées sont toujours en 2018 l’ossature de l’économie allemande. Il me semble que c’est une analyse anticapitaliste, pas particulièrement une analyse antiallemande. Des faits analogues se sont produits ailleurs. Il ne faut cependant pas gommer l’antisémitisme : les camps dont les noms sont cités abritaient en général des déportés juifs. Cela dit, Krupp peut-il vraiment avoir des remords ?

Attentat

Oui, hier samedi 12 mai 2018, dans un attentat revendiqué par l’Organisation État Islamique, un terroriste attaque, blesse et tue des passants avec un couteau peut-être emprunté à sa mère. Je pose à nouveau la question : pourquoi faire tant de place sur les chaines d’info en continu à ce type d’évènement, évidemment totalement insupportable et condamnable ? (Un chroniqueur de France Inter fait remarquer qu’il vaudrait mieux dire Chaines d’info répétitive.) C’est entièrement condamnable, mais pourquoi faut-il en parler tant ? Aurais-je pu être l’un des passants dans ce quartier ? Oui. Que puis-je faire ? Rien. Cela ne va pas m’empêcher de sortir et d’aller où je souhaite, puisque comme le disent les commentaires cela peut se produire n’importe où, n’importe quand et par de très nombreuses méthodes, y compris très simples comme un couteau peut-être emprunté à sa maman. Du coup, est-il utile d’y donner tant de place, de faire monter l’inquiétude ? Que puis-je y faire ? Un conseil avisé hier à la télé : prendre quelques précautions simples : lorsqu’on rentre quelque part, regarder par où l’on peut fuir, où l’on peut se cacher. Cela crée une atmosphère bien difficile. Effectivement, à induire de telles nécessités, les terroristes ont gagné. Mais sans doute vaut-il mieux le faire. Durant l’été 1960, j’avais 17 ans et pour des raisons familiales complexes j’ai passé un mois en Algérie. Avec ma sœur, lorsque nous allions où que ce soit, nous regardions effectivement par où on pouvait se sauver, où l’on pouvait se cacher, sous quelle table on pouvait se coucher. Il faut dire que le café de centre-ville où nous buvions en famille le soir même de notre arrivée avait fait l’objet d’un attentat. Nous n’étions pas néophytes. Cela ne nous empêchait pas d’aller à peu près partout, sauf dans quelques quartiers où on nous avait déconseillé d’aller. Avions-nous peur ? Je ne me rappelle pas. Peut-être ma sœur pourrait-elle le dire. Ai-je peur dans le métro, chez Tati, Boulevard Voltaire ou rue de Charronne (où je passe souvent), aux Champs Élysées, place de l’Opéra, dans une salle de spectacle ? Non. Je l’ai déjà dit : j’ai peur, vraiment, en traversant la rue, car les automobilistes et les motocyclistes sont loin de respecter les feux des piétons.

Je n’ai pas peur non plus dans un stade de foot, parce que je n’y vais jamais. Mais lorsque j’entends à la radio la façon dont on doit traiter les supporteurs pour qu’ils ne se massacrent pas réellement pendant le trajet (les bus ne doivent pas s’arrêter sur les mêmes parkings), dans le stade puis en sortant dans la ville (en fait on les empêche de sortir ensemble dans la ville et ils rentrent au plus vite dans leurs autobus pour retourner chez eux), je constate que le problème n’est pas, dans ce cas, le terrorisme. C’est pourtant bien connu, le sport est un moment de fraternité. Vaut-il mieux combattre pour le Christ comme pendant les croisades ou les guerres de Religion, pour Allah comme certains fanatiques, pour du pétrole et des matières premières, ou se massacrer férocement pour les finances d’un club de foot ? Hier 18 mai 2018 un match a été annulé du fait d’insultes racistes et de jets de projectiles. J’avoue, de façon très basique, ne pas comprendre. L’annulation du match est un coup pour les finances du club que les souteneurs soutiennent. C’est évident : ce sont les musulmans qui ne veulent pas s’intégrer dans notre culture aux racines chrétiennes et dans notre civilisation.

Franchement, JM B, comparer les deux c’est du délire. Je ne sais pas. J’avais démarré ce paragraphe en voulant parler des attentats au stade de St Denis, mais c’est autre chose qui est venu sous mes doigts. Même si cela vous choque, ce paragraphe n’est pas vraiment au second degré.

RGPD, protection des données personnelles : pourquoi je trouve que c’est un important progrès démocratique

Ce règlement remplace la directive sur la protection des données personnelles adoptée en 1995 (article 94 du règlement) ; contrairement aux directives, les règlements n’impliquent pas que les États membres adoptent une loi de transposition pour être applicables. C’est pourquoi il s’applique dès le 25 mai 2018, même si en même temps la France organise un débat parlementaire pour renforcer encore ce texte, ce qui n’était pas obligatoire. (Signalé par ML, merci.)

Cela me parait important car, contrairement à ce qui se passe en ce moment, il est dans ce texte affirmé grâce à différentes mesures que l’on ne peut pas utiliser vos données personnelles sans votre accord explicite, sans vous dire ce qu’on va en faire, que l’on doit vous informer en cas de « grave » (?) de piratage pour que vous puissiez prendre des mesures… Je considère en général l’Union Européenne comme un outil du capitalisme libéral (oh là, tout ça !), même si je pense qu’il faut y être. Mais je me demande donc grâce à quelles considérations et quels rapports de force ce texte que je pense progressiste a été adopté.

Du coup, puisque ce texte s’applique aux associations, nous, militants, devons-nous chacun y travailler ? Pourquoi ? On ne va tout de même pas se plier à la bureaucratie de Bruxelles… Et pourtant il me semble qu’il le faut, car cela aura une vertu pédagogique énorme. En travaillant pour appliquer ce texte dans notre assoc progressiste, nous et les autres militants le comprendrons mieux, nous serons beaucoup plus vigilants vis-à-vis de Google et Amazon, vis-à-vis des très nombreux organismes qui nous fichent. Je pense que, justement parce que nous sommes militants, nous ne devons pas balayer ce texte d’un revers de main comme « émanant de la bureaucratie de Bruxelles ». Ce qui est ennuyeux c’est bien sûr que si je m’adresse aux responsables de telle ou telle association à laquelle j’appartiens je vais aussitôt passer pour un emmerdeur tatillon. Je vais essayer, je vous dirai !

Protection des données personnelles : conséquences pour les particuliers

Suite de l’épopée abordée dans le précédent numéro de [alerte] sur le règlement européen RGPD qui entre en vigueur dans tous les États de l’Union le 25 mai 2018.

Quelles sont les conséquences pour les particuliers ? Je m’inspire du texte de Martin Untersinger paru le 8 mai 2018 dans lemonde.fr Les italiques ne marquent pas des citations, mais signifient « inspiré par MU ».

Le RGPD ne concerne pas les données que les particuliers traitent pour leur usage strictement personnel. (Cette limite concerne je pense les carnets d’adresses, etc. Mais du coup ai-je le droit de communiquer un numéro de téléphone à un autre ami ? Question pas si bête. Êtes-vous sûr que communiquer un numéro de téléphone sans avoir demandé la permission ne va pas créer des problèmes personnels, familiaux, professionnels ? J’ai à ce sujet un exemple récent. Le numéro de téléphone a été communiqué, pas par moi, dans une excellente intention, et pourtant ce n’était pas une bonne idée.)

Le RGPD renforce un droit français déjà protecteur.

Désormais, dans le cas général, à partir de 16 ans un mineur n’a plus besoin de l’autorisation de ses parents pour utiliser un réseau social ou pour consentir à ce que ses données personnelles soient utilisées. (L’un de vous sait-il comment on vérifie ?). / Les internautes pourront récupérer et transférer leurs données personnelles d’un opérateur à un autre (portabilité). / Les entreprises gérant des données personnelles doivent prendre des mesures de sécurité pour prévenir les fuites, et prévenir les intéressés en cas de fuite « engendrant un risque élevé pour les droits et les libertés. (JM B : ???) / Les particuliers s’estimant lésés peuvent lancer une action auprès des autorités de régulation (CNIL) et aussi (c’est nouveau) une action collective. L’association La Quadrature du Net va aussitôt lancer une action collective contre Google Amazon Facebook Apple Microsoft.

Je ne sais pas vous, mais moi, dans ces conditions, je trouve que l’Union Européenne peut avoir du bon.

Aujourd’hui 17 mai 2018 la France est déférée devant la Cour de Justice Européenne pour la mauvaise qualité de son air. Eh bien ! Sur la scène internationale M. Macron se pose pourtant en champion de la défense de la planète et des accords de Paris contre l’odieux M. Trump.

Israël, Palestine, Histoire et présent

Je suis toujours extrêmement intéressé par les études historiques et archéologiques qui tentent de mettre en relation la réalité de l’époque avec les épopées mystiques telles que la Bible, les Évangiles… Mais bon. Il est tout à fait passionnant d’étudier ce qui se passait peut-être il y a des milliers d’années en Égypte, l’Exode, la terre promise par Dieu au peuple juif. Mais, que la Bible le veuille ou non, il y a en ce moment, en 2018, des Palestiniens en Palestine. Le Premier ministre d’Israël et de très nombreuses personnes ou pays qui le soutiennent considère que c’est la guerre et ne semble pas considérer que, outre les Israéliens juifs, il doit aussi y avoir une place pour les Palestiniens. C’est la guerre ? Si c’est la guerre, cela signifie apparemment que l’armée d’Israël peut tuer les Palestiniens à Gaza ? C’est simple : il suffit de les baptiser terroristes. Quel est alors l’objectif de la guerre ? Quelle est la place des Palestiniens ? Le gouvernement d’Israël ne le dit jamais. C’est la guerre. Si l’on n’en connait pas l’objectif, comment saura-t-on que la guerre est finie ? Avec qui peut-on faire la paix ? C’est terrible. C’est une guerre sans paix possible.

Dans Le Monde.fr le 1mai 2018, David Elkaïm, auteur de plusieurs ouvrages sur Israël, chercheur au Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), enseignant à Sciences Po écrit :

Une occupation contraire aux intérêts d’Israël

Comme la solution à deux États, la démocratie israélienne peut encore être sauvée : la société israélienne est multiple, complexe et, en son sein, le soutien à la solution à deux États reste majoritaire. Surtout, beaucoup perçoivent l’occupation pour ce qu’elle est : contraire aux droits des Palestiniens, elle est aussi contraire aux valeurs et aux intérêts d’Israël.

Israël a toujours considéré qu’il lui fallait acquérir la supériorité militaire sur les États arabes de la région, faute de quoi ils n’accepteraient jamais son existence. Alors que cet objectif est sans conteste atteint – plus aucun d’entre eux n’envisage de déclencher une guerre –, la proposition semble s’être inversée, comme si grâce à la puissance de Tsahal, Tel-Aviv croyait ne plus avoir plus besoin d’échanger les territoires pour avoir la paix. Pourtant, sans solution pacifique au conflit qui l’oppose aux Palestiniens, Israël ne sera jamais un pays « normal », comme David Ben Gourion en avait formulé le vœu.

Bon. Je ne devrais pas publier des articles hostiles à la politique de Netanyahou, et donc (selon les partisans de Netanyahou) antisémites !!

Très important : le 16 mai 2018 vers 9 heures du matin Rony Brauman a accordé un long entretien à France Culture. Si vous avez un tout petit peu de temps, s’il vous plait écoutez-le. Il connait bien l’histoire d’Israël, il a beaucoup réfléchi à des questions fondamentales sur le sionisme, la religion, la nature de l’État d’Israël. Bien sûr j’ai appris une quantité de choses que j’ignorais, mais surtout j’ai été passionné par le fait que l’on ait la force et la rigueur de présenter de telles analyses. Il serait assez prétentieux de dire que je me sens très en accord avec lui, car j’ai au départ une faible connaissance des questions. Vraiment, quelle que soit la façon dont vous abordez la question, ces entretiens sont d’un apport fondamental, le premier et le deuxième.

https://www.franceculture.fr/personne-rony-brauman.html

Attention: ce lien pointe vers des textes que j'estime importants. Pour des raisons que je n'ai pas réussi à trouver il n'est pas cliquable. Faites un copier coller dans la barre d'adresse de votre navigateur.

Un entretien de 15 minutes, un entretien de 23 minutes Ne tardez pas, je ne sais pas combien de temps les podcasts restent en ligne.

Profit du capital, rémunération du travail

C’est comme cela : les détenteurs de capitaux les investissent et font du profit, les travailleurs produisent et reçoivent un salaire. Simplement rien ne dit quelle doit être la répartition. Je pense que, quel qu’ait été le système soviétique il a, par sa stature, un peu servi de garde-fou et limité les excès. Depuis la chute du mur, dans l’ensemble, la répartition profit/salaire s’est largement déplacée du côté du profit.

Un article de Libération le 14 mai 2018. Les italiques ne représentent pas des citations, mais signifient « inspiré par ».

Un rapport de Oxfam (confédération d’ONG qui luttent contre la pauvreté dans le monde). Depuis 2009 les richesses créées ont été redistribuées essentiellement en faveur du capital et dans des proportions qui font de la France un petit paradis pour les actionnaires et les très grosses rémunérations. Sur les 600 milliards de profits accumulés de 2009 à 2017 les entreprises du CAC40 ont reversé 407 milliards à leurs actionnaires. Les grands groupes français sont les plus gros payeurs de dividendes en Europe, loin devant l’Allemagne. Le président Sarkozy avait exprimé une règle des trois tiers : un tiers des bénéfices pour les salariés, un autre aux actionnaires, le dernier étant réinvesti dans l’entreprise. Moins de dix ans plus tard on en est plutôt à 2/3 1/3 et tout se passe comme si l’investissement et la récompense (? Traduit de l’anglais ?) des salariés n’étaient qu’une variable d’ajustement face à la priorité absolue donnée à la rémunération des actionnaires. Sur la période 2009 2017 les géants du CAC 40 ont versé 67,40 euros à leurs actionnaires, ne laissant que 27,30 euros pour le réinvestissement dans l’outil industriel, l’innovation, la recherche et 5,30 euros pour les salariés.

C’est un rapport précis de Oxfam, bien sûr déjà contesté.

C’est là que moi, qui ne suis pas économiste, je ne comprends pas bien les objectifs des actionnaires. Il n’y a pas lieu, je suppose, en termes d’économie, de prendre en compte des notions telles que le sens de la vie, le bonheur des travailleurs et de leur famille. Mais en stricts termes d’intérêt : si les salariés gagnaient plus, ils pourraient aussitôt acheter davantage de biens, de voyages, de loisirs, ce qui profiterait donc aussi aux actionnaires. Si les travailleurs ont à peine de quoi se loger et survivre, comment l’économie peut-elle être florissante ? Ce sont sans doute des idées simplistes, mais je crois que ce sont aussi celles de tel ou tel grand économiste. Simplement ce ne sont pas les thèses qui sont au pouvoir en ce moment dans le monde. Pourtant en termes de règle de trois, cela se tient : les salariés des classes pauvres sont moins riches que ceux des classes moyennes et beaucoup moins riches que les salariés riches et les actionnaires. Mais ils sont aussi beaucoup plus nombreux. Un meilleur salaire aurait des répercussions positives immédiates sur l’ensemble. Bon allez, vous voyez, je n’y connais rien !

Fin de la lettre du 19 mai 2018